Aujourd´hui ça va barder. L´ultimatum de 48h donné par Sarkozy à Gbagbo a expiré hier. «Si avant la fin de la semaine, il n´a pas quitté le poste qu´il occupe en violation de la volonté du peuple ivoirien, ils (Laurent Gbagbo et son épouse) seront nommément sur la liste des sanctions», avait menacé, vendredi dernier, le président français Nicolas Sarkozy. La fin de la semaine étant, en France, le dimanche, c´est un ultimatum de 48h que la France a adressé à la Côte d´Ivoire. Laurent Gbagbo qui se revendique toujours président de la République de Côte d´Ivoire a «répondu» dès le lendemain, soit samedi dernier, en exigeant «le départ immédiat de Côte d´Ivoire des militaires français ainsi que ceux de l´ONU». L´éditorialiste du journal ivoirien en ligne «abidjan.net» a, lui aussi, répondu au président français en ces termes: «Disons tout net à Sarkozy que ce n´est pas lui qui choisit le président des Ivoiriens... les Ivoiriens dignes de ce nom ne cherchent plus à se rendre en France. Un pays qui se cherche et qui peine à retrouver ses marques dans le monde. Il y a tellement de pays émergents que la France ne compte plus et ne pèse plus lourd sur la planète...Si Gbagbo ne va pas en France qu´est-ce que cela lui enlève?». Allusion à la sanction de non-délivrance de visa pour la France comprise dans l´ultimatum élyséen. Le sujet ici n´est pas de savoir qui des deux candidats a réellement remporté l´élection présidentielle en Côte d´Ivoire. Il y a pour cela l´Union africaine ou l´ONU. Le problème de fond est qu´il s´agit là d´un chef d´Etat qui menace nommément un autre chef d´Etat d´avoir à se retirer surtout quand on se maintient soi-même au pouvoir avec des sondages qui vous donnent 20% des voix. Un peu d´humilité! Un peu de sagesse! Si nous ne sommes pas là en présence de l´illustration même de l´esprit colon, c´est quoi alors? «Rouler des mécaniques» contre un pays africain semble plus facile que contre l´Iran en 2009, lors de l´élection d´Ahmadinejad, où le même Sarkozy s´était contenté de crier à la fraude sans en rajouter. C´était encore plus facile avec la Chine lorsque Sarkozy l´a visitée en prenant soin d´effacer de la carte la région du Tibet. C´est toute la France qui perd son crédit avec un tel président qui ne se rend pas compte que le monde a changé. Qu´une ingérence directe comme au temps des colonies n´est plus possible. Elle peut embraser toute une région, voire des continents. Si l´échec de l´expédition de Suez en 1956 ne suffit pas à rappeler la fin d´une telle époque, on peut juste dire que les pays d´Afrique ont, aujourd´hui, un vaste choix de puissances prêtes à les aider et les assister en cas de nécessité. Il y a la Chine, l´Iran, la Russie, etc. Comme il a raison l´éditorialiste ivoirien quand il dit que la France «peine à retrouver ses marques dans le monde»! Ceci dit, tout le monde aura relevé que par ces menaces, le président Sarkozy semble avoir tenu à célébrer, à sa manière, le cinquantenaire de la Résolution 1514 récemment rappelée, à Alger, avec éclat au monde entier. Chacun savait comment Sarkozy voit l´Afrique et les Africains. Son discours de Dakar en juillet 2007 est entré dans l´histoire pendant qu´il en faisait sortir les Africains. L´ultimatum a expiré hier. Sarkozy croit-il vraiment qu´il pourra recoloniser la Côte d´Ivoire pour se faire entendre? Ce sont les Français qui, après avoir été obligés de se serrer la ceinture, doivent se tenir le ventre.