Pour eux, il s'agit du devenir de l'entreprise et de celui des milliers de travailleurs Après avoir pris connaissance de la convention de concession de l'activité ferroviaire, contenue dans la loi n° 01-13 du 17 août 2001 portant orientation et organisation des transports terrestres (une loi datant de 1998 et qui a déjà été adoptée par l'APN), le syndicat de la Sntf s'est formellement opposé à ce qu'il qualifie de «bradage» pur et simple. Conscients des enjeux que cache une telle loi, les représentants des 14.500 travailleurs de l'entreprise ont assuré, lors d'une conférence de presse organisée, hier, au siège de l'entreprise, leur parfaite détermination à aller jusqu'au bout du combat pour sauvegarder ce patrimoine national et ce, «même s'il faut recourir aux grands moyens». Par là, l'on entend recourir à toutes formes de contestations telles que les marches, les rassemblements, les grèves etc. Pour eux, il s'agit du devenir de l'entreprise, de celui des milliers de travailleurs, mais également de tous les Algériens qui, d'une manière ou d'une autre, sont tous concernés par cette question. Après avoir été mis devant le fait accompli, le partenaire social, qui atteste n'avoir pas été consulté dans cette démarche, se dit contraint d'accepter cette loi, mais avec certaines conditions. La première étant de maintenir le statut juridique de l'entreprise en tant qu'Epic au lieu de la faire basculer en EPE, de sorte qu'elle soit le principal concessionnaire. Le syndicat de l'entreprise demande également le maintien du statut du personnel, ainsi que la subvention de l'Etat qui est de l'ordre de 2,5 milliards de dinars annuellement. Une enveloppe qui couvre à peine les frais du maintien du réseau ferroviaire (signalisation, renouvellement des segments de rails...). A vrai dire ce qui inquiète les travailleurs de la Sntf, c'est plutôt le caractère «ambigu» de cette loi sur la concession préconisée par la Banque mondiale. Le partenaire social atteste qu'il ignore tout sur la chose, au moment où l'on apprend qu'un protocole d'accord aurait déjà été signé avec l'Afrique du Sud. Qu'adviendra-t-il des 14.500 travailleurs de l'entreprise? Qui se chargera de l'entretien, est-ce le concessionnaire, l'Etat ou l'entreprise qui est déficitaire? et surtout que restera-t-il à la Sntf, une fois les lignes louées? Autant de questions qui demeurent sans réponse. Même si l'entreprise est endettée jusqu'au cou (plusieurs milliards), il n'en reste pas moins qu'«il est toujours possible de relever le défi». Interrogés justement sur le montant de ces dettes, nos interlocuteurs nous indiqueront qu'ils sont beaucoup moins importants que leurs créances. Celles-ci étaient de l'ordre de 13 milliards de dinars. La Sntf a pu toutefois récupérer une bonne partie (30 %) après être entré en partenariat avec les entreprises Feros et Sider. «A présent, nous avons quelques problèmes avec l'armée qui tarde à honorer ses engagements». Quoi qu'il en soit, le syndicat de l'entreprise ne demande pas plus aux pouvoirs publics que de se conformer aux recommandations du Cnes de 1998 qui préconisent l'utilisation rationnelle et une gestion judicieuse des ressources existantes (matérielles, humaines et autres). Pour le Cnes, «le transport ferroviaire est un monopole national qui exige une présence permanente et une intervention lourde de l'Etat». Même s'il n'est pas attractif - puisqu'il s'agit d'un service public, et il en est ainsi dans le monde entier - il est plus que nécessaire de sauvegarder une entreprise aussi stratégique qui, pour rappel, a plus de 120 ans d'existence. Cela, sans parler des sacrifices considérables qui ont été consentis par ses employés, notamment durant la décennie noire de l'Algérie. Plus de 60 morts et près de 20 milliards de dinars. Aujourd'hui, il est hors de question pour ses «enfants» de permettre le démembrement et la dislocation de la Sntf. Un mémorandum portant sur la situation de l'entreprise et surtout sur les craintes et les aspirations des travailleurs, a été adressé à l'ensemble des instances (ministère des Transports, présidence, médias...). Les travailleurs de la Sntf attendent toujours que les pouvoirs publics sortent de leur mutisme pour répondre favorablement à leurs aspirations.