L'affaire du million de bouteilles de whisky frelaté saisies à Alger remet violemment ce débat sur le tapis. Des voix, de plus en plus nombreuses, s'élèvent pour dénoncer «le massacre programmé» commis sur l'économie nationale. Au moment où industriels et syndicalistes s'élèvent pour dénoncer la «mort programmée» des entreprises productrices de biens et génératrices de mains d'oeuvre, les filières des produits usagés donnent l'impression de ne s'être jamais mieux portées. Le ministre de l'Industrie, parlant du commerce de la friperie, lors de sa visite dans un complexe textile moribond, n'avait pas hésité à le qualifier de «terrorisme des containers». Depuis la fameuse ouverture de l'économie nationale sur le marché extérieur, des milliers de petites entreprises spécialisées dans la confection ont été obligées de mettre la clé sous le paillasson. Des dizaines de milliers d'emplois, 60000 croit-on savoir, ont eux aussi été perdus. Cela, sans oublier tous les emplois annexes perdus en même temps. Le commerce de la friperie, outre le préjudice commercial qu'il fait subir à l'économie nationale et les risques de maladies qu'il induit sur la santé publique, constitue une véritable humiliation pour un pays émergeant comme le nôtre, qui a des recettes pétrolières appréciables, qui ramène de plus en plus d'investisseurs nationaux et étrangers et qui donne l'air d'avoir tous les atouts de son côté pour réussir, n'était cette concurrence déloyale qui a irrémédiablement défiguré l'image de marque, avec ou sans jeu de mot, de nos villes et villages. La situation n'est guère plus reluisante du côté du marché de l'automobile. Le patron de Kia Motors, qui s'exprimait dimanche, lors d'un dîner offert à l'occasion de l'achèvement réussi de sa tombola, a critiqué la mesure de reconduction de l'autorisation d'importation de véhicules de moins de 3 ans, ou en donnant l'apparence, contenue dans la loi de Finances 2003. Cette mesure n'était même pas contenue dans le texte originel, s'est-il indigné. Ce sont les députés qui l'ont introduite. Ils ont même décidé de reconduire la mesure automatiquement chaque année, jusqu'à ce que les concessionnaires se décident à créer des emplois et à mettre en place des usines de fabrication ou de montage des véhicules. Cette démarche semble disproportionnée comparée au constat visible sur le terrain. En dépit des énormes préjudices causés à Kia Motors lors des incidents du 14 juin 2001, il n'en a pas moins créé 400 emplois. Les autres concessionnaires doivent en avoir généré nettement plus. Quant à la fameuse industrie automobile dont parlent les députés, elle n'est pas pour demain au regard de la faible demande en véhicules dans notre pays. Beaucoup de pays, du reste, s'en passent sans problème. Mais aucun, pas même les Etats occidentaux en tout cas, n'accepteraient que des voitures accidentées, constituant un danger pour le conducteur et pour autrui, pour lesquelles on payerait pour s'en débarrasser dans leur pays d'origine, soient introduites ici à des sommes «défiant toutes concurrences», dans tous les sens du terme. En plus, des risques sérieux qui pèsent sur les concessionnaires, et les emplois créés, mais aussi sur les projets de partenariat et autres, devant déboucher un jour sur des chaînes de montage et des usines. L'affaire du million de bouteilles de whisky frelaté, elle, est venue confirmer que l'Algérie est bel et bien en train de devenir un véritable dépotoir pour l'Occident, si bon ordre n'est pas mis, séance tenante, dans le trafic des grosses légumes des containers.