Cette information a mis mal à l'aise les autorités militaires. Quarante militaires et trois membres de la garde communale locale ont été tués, vendredi, vers 17h, au sud de Batna. L'embuscade tendue par un important groupe du Gspc a été opérée dans les maquis d'Iguelfen, à la lisière de Biskra. D'autres sources d'information donnent le chiffre de 40, 45 et même 52 militaires et membres des GLD assassinés, tout comme elles indiquent Theniet El-Abed comme lieu de l'attaque. Ce flottement et ces imprécisions renseignent sur la difficulté d'accès à cette information, d'autant plus amplifiée qu'il s'agit d'une attaque qui a ciblé des troupes d'élite appuyées de membres de GLD, mieux avisés des reliefs accidentés de la région. Un premier bilan, non encore confirmé, fait état de 40 militaires - dont deux officiers - et de trois gardes communaux tués, l'enlèvement d'un militaire et la récupération d'au moins 42 armes automatiques, dont des kalachnikovs et des FMPK, et des tenues militaires, prélevées sur les morts. Cette information, inquiétante à plus d'un titre, fait suite au vol de plusieurs voitures et têtes de bétail, opéré la veille de l'embuscade dans la région et soulève des interrogations à longueur de ligne. Premièrement, elle annonce une année particulièrement meurtrière, avec les 13 autres personnes assassinées à Blida, après que l'offensive des militaires eut donné l'impression d'être venue à bout des derniers sanctuaires des groupes armés. Deuxièmement, elle reflète la faculté de plus en plus grandissante de la part des GIA, le Gspc notamment, d'attaquer de front, et en unités de combat mobiles et structurées. Qu'on en juge : le 5 mai 2002, 15 militaires avaient été tués et 7 autres enlevés à Tizi Ouzou. Le 2 avril 2002, 21 militaires avaient été assassinés à Moulay Larbi, à Saïda, et enfin, 10 militaires et GLD avaient été massacrés, le 17 décembre 2002 à Sidi Medjahed, à Miliana. Autre inquiétude et de taille, le nombre des assaillants et des morts dans cette attaque de Batna. Des estimations donnent entre 50 et 70 le nombre du groupe armé auteur de l'embuscade, ce qui représente un chiffre assez important concentré dans une seule région et en une seule journée, alors qu'on pensait que la nouvelle stratégie élaborée et par l'ANP et par les groupes armés contraignait ces derniers à une atomisation (groupes épars d'entre 6 et 10 élément armés). L'importance de la tuerie (43 morts, 1 enlevé et 17 blessés), le plus important depuis plusieurs années, prête aussi à des «lectures militaires». Le sentiment de malaise affiché par les autorités militaires alors qu'on les poussait à en dire plus sur cette embuscade et l'embargo total décrété à tous les niveaux, reflète cette gêne. On serait tenté alors de s'interroger sur la source qui, la première, avait savamment distillé l'information et ciblé le «circuit porteur». Même le MDN en est resté abasourdi... Le Gspc, auteur vraisemblable de la tuerie, reste le groupe armé le plus important et le mieux structuré des GIA actuels. Fort de ses 380 hommes hégémoniques en Kabylie et à l'Est, pratiquant une parfaite «stratégie de symbiose» en Kabylie et dans les Aurès, ciblant principalement les militaires et autres forces de sécurité, afin de faire rallier les autochtones à sa cause, le Gspc peut, surtout, tisser des ralliements salutaires avec les autres groupes armés du Centre et de l'Ouest, ce qui multiplierait par cent sa faculté de porter le danger là où il veut et ses capacités stratégiques et militaires. Les liens qu'entretient le Gspc avec les réseaux sahélo-méditerranéens d'Al-Qaîda sont une autre source de soucis pour les services de sécurité qui ont subi d'énormes pertes face à ce groupe armé depuis une année, avec au moins 200 militaires, GLD et policiers tués depuis le 1er janvier 2002.