Avoir ces privilèges, entre autres, c'était faire partie de la “pré cour” du sérail, régenté par un Parti-Etat fort et autoritaire. Octobre 1988-octobre 2008.Vingt ans se sont écoulés depuis que le désormais célèbre “chahut de gamins” a donné naissance à un paysage politique et médiatique pluraliste. L'enfantement a eu lieu dans la douleur, et le monstre qui a voulu prendre le relais par la force a semé sur son passage mort et désolation. Vingt ans après, peu d'écrits ont été commis sur cette période cruciale qui a transformé de bout en bout la société, que ce soit dans le domaine de la littérature, du cinéma ou mieux, dans l'écriture de ce pan de l'histoire contemporaine. Aussi, de simples rappels de commémorations journalistiques ne peuvent avoir la prétention d'expliquer ce mouvement, si ce n'est ceux de la chronologie. Les enfants d'Octobre, qui ont aujourd'hui entre trente et quarante ans, se rappellent de ces journées folles où ils ont osé braver, avec l'inconscience de leur âge de l'époque, le pouvoir en place. Ce que leurs parents, pour certains, n'ont pas fait, tenus en otages par le bon de voiture Sonacome et l'embrigadement à l'article 121. Avoir ces privilèges, entre autres, c'était faire partie de la “pré cour” du sérail, régenté par un Parti-Etat fort et autoritaire. Des gamins ont-ils, justement, pu ébranler le pouvoir en place si le ver n'était pas déjà dans le fruit et que des signes de fissuration étaient largement apparents ? Un baril de pétrole au plus bas de son prix, la chute du mur de Berlin accompagnée par l'enterrement sans honneur du socialisme, un pays exsangue en cessation de paiement avec des prêteurs usuriers aux portes de la cité, un pouvoir branlant et inconséquent avec lui-même et son réseau d'embrigadement, des services de sécurité démembrés, l'Etat en instance de séparation avec le parti unique, son alter ego, étaient autant de prémices pour que le bloc monolithique éclate. Le mensonge et la corruption ont fait le reste. Mais, aujourd'hui, que reste-t-il d'Octobre ? La société civile qui a toujours répondu présente pour la sauvegarde de la République s'est rétrécie comme peau de chagrin. Le pluralisme politique est en hibernation. La presse, vitrine tant vantée de la démocratie naissante, vaque à ses occupations. Octobre, un simple souvenir ou un véritable mouvement social ? En attendant les historiens, les enfants d'Octobre se trouvent où aujourd'hui ? A. O.