Alors que l'ultimatum de l'Union Africaine exigeant le retour au pouvoir du président renversé a expiré hier, les nouveaux maîtres de Nouakchott ont empêché dimanche les manifestations de soutien à l'ancien régime démocratiquement élu. Organisées par le Front national pour la défense de la démocratie (FNDD), qui regroupe cinq formations politiques, les manifestations anti-putsch ont été interdites par la police mauritanienne, qui a dispersé dimanche de nombreux manifestants, un peu partout dans le centre de Nouakchott. Cela s'est passé à la veille de l'expiration de l'ultimatum de l'Union africaine exigeant le retour au pouvoir du Président renversé il y a deux mois. Pour rappel, la décision du Comité de paix et de sécurité de l'UA a été prise lors d'une réunion au niveau ministériel à New York, en marge de la 63e Assemblée générale de l'ONU, qui s'est penchée sur la situation en Mauritanie, déclarant, par ailleurs, “nulles les mesures de nature constitutionnelle, institutionnelles et législatives prises par les autorités militaires en Mauritanie au lendemain du coup d'Etat”. Il faut dire que les initiateurs de ces manifestations ont adopté une stratégie de dispersion, qui a mis à rude épreuve les forces de sécurité dans la capitale mauritanienne. En effet, bien qu'aucune manifestation ne soit importante en nombre, la stratégie adoptée des protestataires a obligé les policiers anti-émeutes à aller et venir au pas de course ou à bord de pick-up dans le centre-ville qui baignait dans une odeur de gaz lacrymogène, selon les correspondants de presse présents sur les lieux. Selon Mohamed Ould Mouloud, représentant du Front national pour la défense de la démocratie (FNDD) : “Ces manifestations sont un démenti cinglant de la prétention de la junte que la situation est calme en Mauritanie, que tout le monde a accepté le coup d'Etat et que le peuple bénéficie de la liberté d'expression et de la démocratie.” Le FNDD est une alliance de 5 partis politiques opposée au coup d'Etat. Il s'agit du Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD- ADHIL), de l'Alliance populaire progressiste (APP), de l'Union des forces de progrès (UFP), du Tawassoul (mouvance islamiste modérée) et du Parti pour l'égalité et la justice (PLEJ). Dénonçant le coup d'Etat, cette coalition avait appelé à une première “marche de protestation” à partir de 16h (heures locale et GMT), interdite par le gouverneur de la capitale. Mahmadou, 25 ans, un des manifestants, a déclaré à la presse : “Avant le coup d'Etat, il y avait un peu la démocratie, un peu la réconciliation, un peu la liberté de la presse et on est revenu à zéro.” Un porte-parole de la junte a rétorqué : “Ils veulent donner à l'opinion internationale l'idée qu'ils sont victimes d'un régime totalitaire et autoritaire. Mais aucune police ne peut empêcher une manifestation de 500 000 ou d'un million de personnes quand il y a une réelle mobilisation populaire.” Cela étant, le chef de la junte, le général Mohamed Ould Abdel Aziz, a catégoriquement rejeté l'ultimatum de l'UA, estimant que l'hypothèse était “irréaliste et illogique”, car il était impossible de “revenir en arrière”, selon lui. Une autre source proche de la junte a affirmé dimanche : “Cet ultimatum est chimérique et sans effet”, parce que, a-t-elle ajouté, “la plus grande sanction qu'on puisse prendre à l'égard de la Mauritanie, c'est de nous imposer cette personne à la tête de l'Etat”. Il faut attendre maintenant la réaction de l'Union africaine à cette fin de non-recevoir des putschistes mauritaniens, qui ne bénéficient pour l'heure que du soutien de Rabat. Merzak T.