Il appartient à cette catégorie que l'on qualifie, dans le jargon de la presse, de “monstre”. Il est des personnages que l'on peut décrire en un bref article de presse. Bachir Rezzoug en fait partie. Ce monument de la presse algérienne vient de s'éteindre, laissant davantage de vide dans une profession en mal de repères et en éternelle quête de perfection. Bachir Rezzoug était de ceux pour qui le mot “professionnalisme” n'était pas un simple slogan. Dans l'accomplissement de son travail, il approchait toujours plus la perfection. Il forçait le respect de son entourage et avait toujours les arguments massue pour convaincre les plus sceptiques. Quelque peu effacé ces dernières années, en raison d'une maladie qui le rongeait, Bachir Rezzoug ne s'était jamais remis de la mort de son fils. Son agence, RSM, continuait à travailler selon les principes qu'il avait tracés, toujours avec le même professionnalisme et la même perfection, en publiant des revues spécialisées dont la qualité est unanimement saluée. Bachir Rezzoug appartient à cette catégorie que l'on qualifie, dans le jargon de la presse, de “monstre”. Il a été de tous les combats de la presse algérienne et rien, sauf la maladie, ne l'empêchait de dire ce qu'il pensait, même si cela devait déplaire à ses amis. Fondateur du quotidien La République, Bachir Rezzoug fera partie de l'équipe d'El Moudjahid, avant de rejoindre celle d'Algérie Actualité au début des années 1980, et de finir à Révolution africaine où il laissera des traces indéniables sur la revue qu'il quittera, d'ailleurs, comme la plupart de son équipe, au lendemain d'octobre 1988. La mort a fini par avoir raison de lui, tout comme ses pairs, Abdelhamid Benzine ou encore Kheïreddine Ameyar. Pour ceux qui l'ont côtoyé, cette immense perte accentue davantage le fossé qui sépare le journalisme du trabendisme. Lui, qui ne badinait jamais avec les principes, aurait pu choisir une autre voie que celle du professionnalisme et du perfectionnisme. Avant sa mort, Bachir Rezzoug a obtenu le prix Mohamed Benchicou de la Plume libre pour l'année 2008. Une consécration et une reconnaissance de l'œuvre de ce grand Monsieur de la presse algérienne que beaucoup de journalistes, arrivés à la profession à partir des années 1990, ne connaissent pas. Ce jour-là, Bachir Rezzoug, malgré la maladie, a eu cette réponse à ses confrères qui le désignaient comme “le père de la presse indépendante” : “Je suis un homme d'humilité. Je ne crois pas qu'on puisse me porter au piédestal d'une manière aussi simple. Je ne peux être le père du journalisme indépendant, car il y a d'autres hommes avant moi. Nous ne sommes que les continuateurs de ce cheminement et les continuateurs sont là.” Bachir Rezzoug croyait, jusqu'à sa mort, que l'indépendance de la presse s'arrache et ne s'offre pas. Il croyait dur comme fer que la presse algérienne devrait se libérer du “pouvoir de l'argent”. Une sentence qu'il laissera aux générations montantes qui prendront le flambeau de “continuateurs”, si la continuation sans Bachir Rezzoug est possible. Azzeddine Bensouiah