L'enterrement de Bachir Rezzoug, hier au cimetière de Dély Ibrahim, a été le baromètre de l'estime dont il bénéficie au sein de la corporation des journalistes. Et au-delà. Difficile de distinguer les personnalités des simples citoyens, tellement la foule était nombreuse. Les journalistes venus couvrir le triste événement ont dû parfois faire une entorse au protocole funèbre pour se frayer un chemin. Il y a, en effet, de toutes les couches sociales. Des dizaines de journalistes, beaucoup plus jeunes pour la plupart et n'ont pas connu personnellement leur aîné en majorité, cohabitent avec des figures du monde médiatique -puisque la presque totalité des directeurs des journaux sont venus-, politique, syndical et autres. Signe de la grandeur de l'homme qui vient de nous quitter, le gouvernement est représenté par trois ministres. Noureddine Zerhouni, ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur, Abderrachid Boukerzaza, ministre de la Communication et Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des affaires maghrébines et africaines, sont dans le premier carré. Ils ont témoigné, plus que la reconnaissance pour l'inépuisable talent du journaliste, leur admiration de l'homme qu'il était pendant sa longue carrière. Autant dire que l'homme fascinait comme le journaliste. Non loin d'eux, on peut apercevoir des artistes, à l'image de Saïd Hilmi, ou des syndicalistes, en tête desquels l'inévitable Abdelmadjid Sidi Saïd. Un signe qui ne trompe pas, même le ciel a fait des siennes, puisque le temps est chargé. Presque un deuil mystique, diront certains. Et le silence observé par presque tous les présents a rajouté de la solennité à un événement déjà tragique. Mais loin des pleurs, c'est la dignité qui a accompagné Bachir Rezzoug à sa dernière demeure. De la dignité, le journaliste en a toujours eu. Et ceux qui sont venus lui rendre un dernier hommage ne se sont certainement pas trompés de destination. De la dignité, il y en avait tout autour de ce bout de terre qui a désormais la lourde tâche de contenir un des illustres hommes de la sphère médiatique algérienne. Et ce n'est pas la preuve qui manque. Puisque, dès l'annonce de son décès, l'ensemble de la presse nationale, les médias lourds compris, a rendu un hommage appuyé au virtuose de la plume. Du simple rédacteur à l'éditorialiste qui l'a côtoyé, tous ont su trouver les mots justes pour décrire et rappeler les pages d'or écrites par ce grand qu'était Bachir Rezzoug. En ce mercredi de deuil, les Rezzoug peuvent se sentir réconfortés. Ils ont a trouvé de la compagnie chez ceux qui se sont toujours considérés comme faisant partie des leurs. Si Bachir Rezzoug a réussi durant de longues années à lutter contre la maladie, il n'a pu résister à la Faucheuse. Celle qui, quelques années auparavant, avait emporté son fils –un événement qui avait aggravé son état de santé déjà fragile. Hier, en tout cas, il a rejoint son fils au cimetière de Dély Ibrahim. Son corps est enterré, mais Bachir Rezzoug n'est pas mort. Il a juste rejoint ceux que cite Matoub dans la fabuleuse Kenza : «Même si le corps se décompose, l'idée ne mourra jamais.» A. B.