Wassyla Tamzali a pris part hier au premier café littéraire du 13e Sila. Dans sa communication de plus d'une heure, elle a parlé de son récit Une Education algérienne, grâce auquel elle dit avoir fait le deuil… enterré son père, tué durant la Révolution algérienne. Elle a aussi évoqué son engagement pour les femmes ainsi que sa lutte contre l'intégrisme obscurantiste. À l'issue de sa conférence, elle a brièvement répondu à nos questions. Entretien express. Liberté : Dans votre communication, vous avez qualifié la génération à laquelle vous appartenez de génération romantique. Vous êtes donc désenchantée. Si votre génération l'est, que reste-t-il à la jeunesse d'aujourd'hui ? Wassyla Tamzali : Ma génération n'est pas désenchantée, elle est blessée, parce que le désenchantement, c'est quand vous ne croyez plus en rien ; or, je crois que ma génération continue à croire à des choses, tandis que la jeune génération ne croit pas, ne croit plus en rien… Elle est désenchantée ! Mais nous, nous sommes une génération blessée qui continue à être mobilisée. Dans vos écrits, notamment Une Education algérienne, tentez-vous de répondre à la question “pourquoi la violence ?” par le biais de la mémoire ? C'est bien que vous disiez, que vous liez violence et mémoire. La violence subsiste dans notre mémoire et elle se nourrit d'elle-même tant qu'on en n'a pas parlé. Le problème maintenant, c'est comment passer de la mémoire qui est douloureuse à l'histoire. C'est cela le chemin que nous devons faire. Il faut pouvoir parler parce que du moment que l'on ne parle pas, la violence est enfouie et elle ressurgit. Défendre la cause féminine a été votre occupation première. Que pensez-nous, notamment à travers ce salon, de ce qui se fait comme littérature algérienne par les femmes ? Je pense que la littérature et les femmes, c'est une vieille histoire et même partout. C'est-à-dire que c'est la forme d'expression la plus utilisée par les femmes et même partout. Je pense en disant cela à Virginia Woolf, aux Anglaises qui ont inauguré la littérature, je pense aussi à Marguerite de Navarre. Je veux dire que la littérature a été toujours l'affaire des femmes parce que c'est l'art de l'intime, et les femmes sont dans ce rapport à l'intimité. Alors évidemment, maintenant on peut dire que la littérature algérienne ne peut plus distinguer ni les femmes ni les hommes, elle est portée par les femmes et par les hommes, et qu'il n'y a pas de littérature féminine, il y a une littérature qui est faite par les femmes, mais ce n'est pas une littérature féminine. Il y a la littérature, et c'est tout ! S. K.