L'affaire des deux otages autrichiens s'est bien terminée. Mais les conditions de leur libération sont toujours aussi troubles, ainsi que le rôle joué par les présidents malien et libyen. Huit mois dans le désert et quelques coups de soleil après, Wolfgang Ebner et Andrea Kloiber ont été libérés contre une rançon. Dans le milieu des négociateurs, le paiement d'une “dîme” aux terroristes du GSPC qui ont posé quatre ultimatums sans jamais passer à l'acte, on hésite seulement sur le montant “de 3 à 5 millions d'euros”. Le problème est que le gouvernement autrichien n'a jamais payé cette somme, encore moins le Mali, mais bel et bien le leader Mouammar Al-Kadhafi qui est venu à la rescousse de son ami et homologue malien, Amadou Toumani Touré. Car dans cette sombre histoire, les présidents libyen et malien ont joué avec le feu et les mallettes d'euros. L'implication d'Al-Kadhafi dans le dossier a commencé lorsque le leader d'extrême droite autrichien, Jorg Haider, qui s'est tué récemment en voiture, a demandé à son ami Seïf El-Islam Al-Kadhafi de l'aider à libérer les otages. Les deux hommes voyant l'opportunité dans cette affaire de récolter les lauriers politiques. Haider en augmentant sa popularité la veille d'élections et les Kadhafi toujours à la recherche de “coups médiatiques” afin de redorer le blason de Tripoli depuis la levée de l'embargo. Al-Kadhafi met à contribution Amadou Toumani Touré (ATT), le président malien dont le nord du pays est infesté de groupuscules du GSPC qui sont aussi à l'aise que dans une colonie de vacances. Bamako bat le rappel d'Ayad Ag Ghali, consul malien à Djeddah, et met le maire de Kidal, Baba Ould Cheikh, sur le dossier. Durant des mois, ils ont été les principaux négociateurs avec le GSPC, sans aucune arme et apparemment sans craindre pour leur vie. Ils informaient les Autrichiens des revendications des terroristes et négociaient le prix de l'otage fixé à plus de 2 millions d'euros. Malgré ses discours musclés sur le terrorisme, ATT joue un double jeu. Pour convaincre le GSPC, on rappelle aux terroristes du Sahel que la région nord du Mali n'a jamais représenté un danger pour eux, comme c'est le cas au Niger ou au Tchad où chaque incursion terroriste se casse les dents sur des armées régulières déterminées quand ce ne sont pas les tribus touaregs qui leur font la chasse. Pour Bamako, il est hors de question d'intervenir militairement et encore moins d'inquiéter ses “invités”. Au mépris de toutes les conventions et les résolutions de l'Union africaine ou de l'ONU que le Mali dit prétend respecter pour lutter contre le terrorisme dans la zone sahélienne. Cette protection alla même aux tribunaux puisque les plaintes déposées par des Maliens du Nord contre des attaques ou du racket exercés par le GSPC se sont retournées contre eux. Des sources touaregs se sont dit plusieurs fois scandalisées par les “protections”, dont bénéficient les groupes terroristes. L'armée malienne s'étant interposée à maintes reprises entre les Touaregs et les salafistes au profit de ces derniers. De retour à Salzbourg, les otages autrichiens n'ont pas été trop bavards. Le gouvernement de Vienne avait placé tout son espoir entre les mains des Libyens qui ont servi, dans cette affaire, de financiers comme ils l'avaient précédemment fait dans l'affaire des 32 otages européens kidnappés par l'ex-“émir” du GSPC, Abderezak El-Para. Certains ont même tenté de convaincre Alger de libérer El-Para contre les otages autrichiens ! Mais le cynisme du président malien dans cette affaire a dépassé l'entendement. C'est tout l'appareil de l'Etat malien qui s'est mis au service d'une négociation, dont le GSPC en sort bénéficiaire car non seulement il profite des largesses territoriales d'ATT, mais également d'une rançon de plusieurs millions d'euros qui vont encore être injectés en armes et explosifs dans les maquis algériens. MOUNIR B.