L'atelier de réflexion a été organisé par le Comité international pour le développement des peuples (CISP), une ONG italienne, en présence de plusieurs journalistes. Le phénomène migratoire, tel que traité par la presse, diffère sensiblement dès qu'il s'agit de nos harragas ou des migrants subsahariens. Et pourtant, dans les deux cas, les similitudes sont bien réelles, chacun est mu par la volonté de rejoindre coûte que coûte les frontières de l'Europe à la recherche d'une existence digne et meilleure. Cette différence d'approche dans le traitement du phénomène a fait l'objet d'un atelier de réflexion organisé par le Comité international pour le développement des peuples (CISP), une ONG italienne, qui s'est tenue hier à Oran au siège de l'Afepec. De nombreux journalistes représentant les organes de presses comme Liberté, El Watan et El Khabar y ont participé où un échange de réflexion et d'idées a eu lieu quant à l'image du migrant subsaharien, ou celle aussi du harraga. Images qui ne se croisent pas. Si la presse a, en effet, permis par ses écrits d'imposer la question des harragas, en lui consacrant des articles de fond et d'analyses, les présentant “comme des victimes, des sortes d'aventuriers”, il en est tout autre pour les migrants subsahariens qui sont stigmatisés. Il suffit d'un fait divers dramatique, impliquant un Africain, pour que les réflexes de xénophobie ressurgissent, faisant de toute une communauté, sans distinction de nationalité, des coupables tout désignés. Une sorte d'exutoire par rapport à nos propres difficultés et malaise social. Lors des échanges, de nombreux participants, comme le sociologue Zemmour du Crasc d'Oran, ont fait remarquer que le vécu de ces migrants subsahariens illégaux, par exemple à la frontière ouest, et leur rapport avec les Algériens n'étaient qu'à l'image de ce que les immigrants algériens en France avaient vécu ou vivent encore. Les migrants subsahariens sont très souvent exploités, pourchassés, malaimés et incompris, devenant une sorte de sous-prolétariat pour les Algériens. Certains parviennent à s'intégrer, mais ils sont rares. Lors de cet atelier, une projection de quelques minutes d'un documentaire Le piège réalisé par Djamel Benramdane et Kays Djilali a mis en lumière le vécu de ces migrants subsahariens dans notre pays. Des témoignages poignants sur leur situation d'illégaux devant se cacher et se déplacer souvent pour éviter d'être pris par la police. Durant les années 2005 et 2006, des rafles massives ont été opérées à la frontière marocaine. Leurs conditions de vie sommaires, leur manque d'hygiène, leur souffrance, sont montrés simplement et ne laissent pas indifférent le spectateur. Deux étudiants subsahariens présents à cet atelier ont eux aussi apporté, à leur façon, leurs témoignages évoquant le poids du regard de la société sur la présence des migrants subsahariens. Mais aussi de la difficulté d'engager un dialogue, avant de dire que malgré tout, pour ces migrants subsahariens en situation illégale, l'écoute était importante pour qu'ils puissent eux-mêmes livrer leurs paroles. Mais il est vrai que sur ces questions, le rôle des médias est important, l'image renvoyée est forgée par des articles privilégiant l'événementiel, le sensationnel au lieu de l'analyse parfois peut-être grave et lourd de conséquences. DJAMILA LOUKIL