Nantis de 750 sièges distribués entre les rangées de fauteuils agencés au rez-de-chaussée qu'est l'orchestre d'une salle de spectacle et la galerie du premier étage qu'est le balcon, l'ancien Hollywood ambitionne de désembourber la capitale de la misère culturelle où elle s'est engluée. Située à l'extrémité de la piétonnière Ferhat-Boussad (ex-rue Meissonnier) et à l'estuaire de la venelle baptisée au nom de Rabah-Noël (ex-Hobert), l'enseigne rivée sur la façade liftée de la salle de cinéma le Sierra Maestra augure d'ores et déjà d'étinceler autant que l'ancienne pancarte d'Hollywood. Et pour cause, notre intrusion à la dérobée d'au… nez et à la barbe du gardien du chantier a abouti dans l'oblongue corridor revêtu d'une tapisserie bleue sans nuage où nous fûmes reçus par une succession de luminaires que diffusent l'agréable réconciliation d'avec la maxime “exit” signalant à l'opéra : “Exit le roi ou qu'un personnage doit sortir de la scène”. Toutefois, notre progression à pas de loup dans la salle de l'orchestre garni jusqu'à la voûte d'une moquette à l'identique nuance de l'entrée n'est pas passée inaperçue. Alors, mine de rien, nous saisissons l'opportunité rêvée de faire un brin de conversation aux représentants d'un panel d'opérateurs en exercice sur le site. Enfin, et peu importe l'hardiesse du… “localier”, l'intitulé de notre… “canard”… a tôt fait de lever le voile de la défiance de nos interlocuteurs qui ont bien voulu nous faire le tour du propriétaire. Il était une fois le “H” de l'Hollywood Autre signe d'une époque bénie, le symbole graphique natté artistiquement tout autour du caractère typographique “H”, qu'indique l'Hollywood d'autrefois, n'a souffert d'aucune atteinte, malgré les stigmates d'aveulissement dues avant tout au squat par de smalas qui avaient trouvé en ces lieux-ci gîtes et couverts. Quoi qu'il en fût, la lettre “H” qu'est la réviviscence d'un Alger, où il faisait bon de sortir au cinéma, a survécu non seulement à l'outrage de l'isolement, mais il se maintient vaille que vaille en haut de l'écran. Itinéraire En hommage aux forces Castristes qui avaient pris d'assaut l'hacienda de la Moncada de Batista le tyrannique, l'Hollywood fut rebaptisé au nom des verts pâturages de la Sierra Maestria par le défunt Houari Boumediene. C'était la période où bled Sidi Abderrahmane s'enorgueillit d'être la mecque des révolutionnaires. Après ce concis intermède dans l'histoire où la perspective de l'époque était à l'étendard rouge et les t-shirts à l'effigie du camarade Che Guevara, nous voilà en bas de l'écran qui n'a pas d'autre part son égal, si l'on exclut la perte au cours d'un incendie en l'an de grâce de 2005 de l'incommensurable écran de la salle Le Marignan de Bab El-Oued. Tromperie sur le siège Aujourd'hui et selon le premier magistrat de la commune de Sidi M'hamed, en l'occurrence Mokhtar Bourouina, le Sierra Maestra s'est doté du statut d'une salle polyvalente dont l'inauguration est tributaire d'abord de la pose des sièges : “L'ouverture de la salle de cinéma Le Sierra Maestra au grand public est prévue dès la réception du lot des chaises, pour lequel il y a eu un appel d'offres. S'il en est, le retard est dû à l'incapacité de l'opérateur de s'acquitter de l'une de ses obligations contractuelles, dont le respect du choix du modèle d'un siège d'une salle de cinéma au lieu d'un siège de théâtre qu'il allait nous fourguer, n'était notre vigilance. Il y eut donc tromperie sur la marchandise, et c'est ce qui nous a obligé à résilier le marché après avoir adressé une lettre de mise en demeure à l'indélicat opérateur, lui enjoignant de satisfaire à ses engagements dûment stipulés à l'annexe technique au contrat.” S'agissant du montant de l'opération, le descriptif des travaux a nécessité l'effort pécuniaire de huit milliards de centimes qu'englobe le devis de l'agencement de la salle, la reconstitution du réseau d'assainissement de l'édifice ainsi que la tapisserie du parterre et des murs. “C'est peu si l'on évalue l'effort financier qu'a requis la salle de cinéma l'Algeria. D'autant plus si l'on recense l'achat de l'attirail de la ventilation, le matériel de sonorisation, l'écran géant, le système de détection d'incendie ainsi que l'armoire de commande électrique et un groupe électrogène indispensable en cas d'une interruption de courants”, a tenu à préciser notre interlocuteur. Quoi qu'il en soit, l'ancien Hollywood est une mise de fond utile pour gagner un peu de chaleur et de la gaîté dans la morosité ambiante d'une capitale engluée dans la misère culturelle. En attendant ce jour, notre interlocuteur a voulu conclure avec une perspective d'espérance : “L'éclat de la salle Le Sierra Maestria est un moindre placement par rapport à ce qui est prévu pour la salle l'Afrique.” Et rien que pour ça, nous y reviendrons. Nazim Djebahi