Dans les Aurès Les plats traditionnels des tribus au menu Si toutes les familles batnéennes préparent le couscous au second jour de l'Aïd Kébir, au premier jour, selon les traditions tribales, on prépare des mets différents. Il y a celles qui font, “leghrayef” ou “baghrir”, il y a celles qui font “chakhchoukha echouat” ou thridat tajine appelée aussi “naâma” et il y a même ceux qui préparent “elaîche” (gros couscous). “Chacun comme l'exige sa tradition, l'histoire de sa famille ou de sa tribu”, nous fait remarquer Lala Zohra, une septuagénaire. Cette bonne dame nous apprend que la tradition est respectée scrupuleusement et aucun écart n'est permis de peur de s'exposer à des malheurs. “Dans ma famille, le premier jour de l'Aïd Kébir, on mange leghrayef”, nous dit-elle. De bon matin, Lahrair (les femmes) retroussent les manches et préparent “leghrayef” à manger à midi nappées de miel et de beurre. Pour les familles qui font “chakhchoukha echouat” ou “thridat tajine”, la préparation se fait la veille du jour J. De bon matin, les femmes commencent à aplatir la pâte en fines feuilles à la forme arrondie pour les cuire. Au déjeuner, ce mets, garni de viande est servi. La plupart du temps, le méchoui est laissé le soir. Le deuxième jour, l'honneur est accordé au plat par excellence, le couscous. La femme, qui arrive à faire sortir le “methred” (le plat) de couscous garni de l'omoplate droit de la bête, est celle qui emporte le palmarès de “El-Fahla”. Lors de ces jours de l'Aïd Kébir, les femmes échangent les mets, d'un côté pour montrer leur savoir-faire dans le domaine culinaire et de l'autre pour partager “el melh” avec les voisins. Dans la plupart des familles citadines, pour moult raisons, cette transmission des traditions est rompue. Ces mets traditionnels constituant le vecteur d'identité des familles, des tribus, des régions sont en voie de relégation car, tout simplement, n'est pas fehla qui le veut, nous dit-on. B.Boumaïla à Bordj Bou-Arréridj La frime chasse le spirituel A Bordj Bou-Arréridj, dix jours avant cette date, fleurissent nombre de petits commerces (d'épices, de nappes, de sacs blancs de plastique, d'ustensiles de cuisine...). Le jour “J”, certains Bordjiens se transforment en bouchers et monnaient leurs services. On n'égorge plus le mouton comme avant. L'évolution du mode de vie a entraîné de nouvelles habitudes. Ce sont des bouchers ambulants qui font le tour des zones urbaines et fixent leurs tarifs entre 300 et 500 DA par animal. Ils se débrouillent pour être munis des outils de circonstance tels le couperet, le couteau, la scie, etc. La communion entre les voisins est profonde et peut aller jusqu'à offrir un bélier aux familles pauvres. Cependant, souvent, les valeurs spirituelles de l'Aïd El Kébir comme la solidarité et la cohésion sociale laissent la place à la consommation de masse et à la rivalité entre voisins, surtout dans les milieux populaires : qui va sacrifier le plus gros mouton ? “Sacrifier un mouton est devenu donc plus qu'un acte religieux non obligatoire. Il est devenu une nécessité imposée par la société très axée sur les apparences”, souligne El Hadj Tayeb. Chabane BOUARISSA