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Contestation islamiste et lutte antiterroriste (1)
Analyse sur la Libye de 1990 à 2007
Publié dans Liberté le 15 - 12 - 2008

Le régime de Mouammar Al-Kadhafi était jusqu'à une date très récente un facteur d'instabilité au Maghreb et en Afrique. Les ardeurs excessives du régime du colonel Al-Kadhafi ont fait de la Libye l'une des bêtes noires des Etats-Unis, de l'Europe et de ses voisins immédiats (notamment l'Egypte, la Tunisie, l'Algérie et le Tchad). Le comportement de son dirigeant lui a valu également des sanctions sévères qui ont fini par affaiblir son pouvoir et le forcer à composer avec les puissances étrangères de peur d'être renversé.
Au cours de son histoire, le régime du colonel Al-Kadhafi, soutien dans les années 1970 et 1980 de divers mouvements “révolutionnaires” et groupes “terroristes”, tels que celui du Palestinien Abou Nidal, a fait subir à sa population une répression sans précédent. À la suite de l'affaire Lockerbie (…), l'ONU et les Etats-Unis ont imposé de sévères sanctions économiques au pays. Ces sanctions et l'échec du mode de développement économique libyen n'ont fait qu'accroître le ressentiment de la population envers le pouvoir en place et ont alimenté diverses formes d'opposition clandestine (…) notamment islamiste radicale. Cette dernière a cherché à renverser à plusieurs reprises le régime (…) À l'image de ce qui s'est passé dans les pays voisins, l'islamisme s'est affirmé comme une force de résistance au régime “tyrannique” et “impie”. Toutefois, les véritables groupes djihadistes n'ont fait leur apparition que dans les années 1990 sous l'influence des combattants libyens revenus d'Afghanistan. Le régime a répondu aux actions violentes des islamistes par une répression féroce. (....) Cette répression sévère qui marquait, en même temps, la fin du timide processus de libéralisation de la fin des années 1980, allait conduire à l'émergence de groupes de plus en plus radicaux. Le refus du régime d'appliquer les garanties légales aux islamistes ne les a pas dissuadés de mener des actions visant à renverser le pouvoir en place. Selon certaines sources, le Groupe islamique combattant libyen (GICL) aurait tenté d'assassiner Kadhafi en février 1996. Cette attaque aurait fait de nombreuses victimes dans l'entourage du Guide. Une autre tentative a apparemment eu lieu en 1998. (…) Dans le contexte de la première moitié des années 1990, le mouvement islamiste a réussi à enrôler dans ses rangs des militaires mécontents, souvent originaires des régions pauvres, véritables pépinières de recrutement pour les groupes islamistes armés en gestation. L'usure du régime et la faillite de la politique économique ont poussé certains jeunes à rejoindre des groupes armés : le Parti de la libération islamique, le GICL, le Mouvement des martyrs de Libye, et le Groupe islamique de Libye. D'autres groupes armés ont, eux aussi, fait leur apparition en 1996, tels que le Groupe islamique libyen ou Ansar Allah ou plus tard le Mouvement des patriotes libyens, né en 1997. En fait, le mouvement islamiste s'est véritablement radicalisé à partir de l'été 1995, date à laquelle des confrontations entre les islamistes et les autorités ont eu lieu. (…) Ce n'est qu'en 1999 que les forces de sécurité libyennes déciment les mouvements djihadistes. Force est de constater que pendant cette période, le colonel Kadhafi n'a pas fait appel à l'armée pour réduire les mouvements armés. (…) La désertion, dans la première moitié des années 1990, de certains militaires aux sympathies islamistes partis pour rejoindre le maquis a fait office de signal d'alarme pour le “Guide de la Révolution”, la stratégie du régime a consisté à faire appel aux forces de sécurité pro-Kadhafi les plus loyales (…), pour mener la lutte contre les groupes armés. (…) (Contrairement) aux Algériens, qui n'ont pas succombé longtemps à la propagande du pouvoir, les Libyens sont restés longtemps sensibles au discours anti-impérialiste du régime. (…)
Les tactiques du régime de Kadhafi pour contrer la montée de l'islamisme
Afin de combattre la montée et l'influence de l'islamisme, le régime a eu recours à trois tactiques principales. La première a consisté à se doter d'une légitimité religieuse en appliquant certaines lois islamiques, quoique réinterprétées, afin de les adapter à la Troisième théorie universelle élaborée par le “Guide de la Révolution”. (…) Ce faisant, le colonel Kadhafi a fait du fondamentalisme d'Etat afin de répondre à la critique islamiste qui mettait en doute les bases islamiques du régime. La seconde approche, liée à la première, a consisté à (…) démontrer que les autorités étaient plus proches de l'orthodoxie islamique que les islamistes eux-mêmes dans le vain espoir de reconquérir le soutien des religieux traditionalistes. (…) La troisième tactique utilisée par le régime a été de lancer une répression impitoyable contre les islamistes. Les forces de sécurité sont allées jusqu'à détruire les maisons des “dissidents”, tandis que de son côté, le Congrès général du peuple a adopté en 1997 une série de mesures et de lois instaurant des punitions collectives. (…) Le régime n'a pas lésiné sur les moyens : aviation et tanks ont fait partie de l'arsenal utilisé. La répression a surtout frappé Benghazi, particulièrement en 1998, à la suite d'une énième tentative d'assassinat de Kadhafi. Bien que sur le plan militaire, le régime ait repris les choses en main, la situation politique et sociale était difficile et le régime craignait pour sa survie. C'est dans ce contexte que le pouvoir a entrepris de normaliser ses relations avec Washington et avec l'ONU afin d'obtenir la levée d'un embargo coûteux. Les évènements du 11 septembre, ainsi que l'amélioration des relations avec les Etats-Unis, ont permis à la Libye de durcir la répression contre les islamistes — ou plus généralement contre toute forme d'opposition accusée par définition d'être islamiste — et de restreindre considérablement leurs activités. Si les mauvaises relations de Kadhafi avec l'Occident, ainsi que son opposition sans équivoque à Israël, ont réduit, dans les années 1980 et 1990, les munitions idéologiques que les islamistes auraient pu utiliser contre lui, aujourd'hui son rapprochement avec l'Occident pourrait bien donner aux futurs djihadistes de nouveaux arguments pour le renverser.
Islamisme et “guerre mondiale contre le terrorisme”
Pendant qu'elles combattaient sur son territoire les groupes islamistes armés, les autorités libyennes ont réduit leur soutien à divers “groupes terroristes” et “mouvements de libération” à l'étranger. L'objectif principal de la Libye est, depuis les années 1990, de mettre fin à son isolement sur la scène internationale. Confrontés aux groupes islamistes armés, les officiels libyens ont décidé à partir de 1995-1996 de collaborer étroitement avec les Etats voisins, l'Algérie, la Tunisie et l'Egypte. Mais plus importante encore, a été la décision libyenne de coopérer avec les Etats-Unis dans la lutte contre le réseau d'Al-Qaïda, dès avant les attentats du 11 septembre 2001. (…) La dénonciation des attaques du 11 septembre par la Libye est venue confirmer l'intérêt du colonel Kadhafi pour un rapprochement avec les Etats-Unis, reconnaissant à ces derniers le droit de châtier les terroristes et le régime des talibans en Afghanistan (…). Bien que le régime ait réduit son aide aux “groupes terroristes”, il n'a pas hésité à utiliser ses relations privilégiées avec ces derniers pour mettre en avant ses intérêts nationaux. Et c'est précisément son aptitude à exercer une influence sur ces divers mouvements islamistes, notamment à travers l'association missionnaire, la Da'wa al-islamiyya, qui a permis à la Libye d'être inscrite sur la liste des “pays en lutte contre le terrorisme”. Il faut noter que Kadhafi est très habile à ce jeu, alors qu'il a apparemment contribué à la création de milices islamistes arabes au Darfour, il est aujourd'hui sollicité par l'ONU et les Etats-Unis pour jouer le rôle de médiateur dans la crise. (…) Absente du discours de 2002 de George W. Bush en 2002 sur “l'Axe du Mal”, la Libye va toucher au début du XXIe siècle les premiers dividendes de son implication dans la “lutte contre le terrorisme”. Dès 2002, le gouvernement britannique — tout en accordant le statut de réfugié politique aux membres du GICL ayant fui la répression du régime de Kadhafi —, a sollicité la coopération des Libyens dans le renseignement sur le “terrorisme international”. Les autorités libyennes ont répondu favorablement et fourni des informations précieuses sur des centaines de partisans d'Al-Qaïda et autres militants islamistes. (…) En 2002, la Libye est devenue partie à la Convention de 1999 pour la suppression et le financement du terrorisme. Ensuite, elle a adhéré à la Convention de 1991 sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection. La Libye a également ratifié les douze conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme.
Les dividendes de la lutte antiterroriste : “Al-Qaïda au Maghreb islamique”
(…) En mai 2006, les efforts libyens ont été récompensés par les Etats-Unis, qui ont rayé la Jamahiriya de la liste des pays parrainant le terrorisme. Par ailleurs, les Etats-Unis ont impliqué discrètement la Libye dans le système sécuritaire qu'ils ont établi dans la région du Maghreb-Sahel (…). Ces évolutions internationales ont donné une marge de manœuvre supplémentaire au régime à l'intérieur du pays, puisque la répression de son opposition s'inscrit désormais dans la perspective de la “lutte mondiale contre le terrorisme”. Le régime de Kadhafi est devenu fréquentable : l'embargo sur les armes a été levé et la Libye s'est vu confier par l'Europe la tâche de la protéger contre les migrations venues d'Afrique. Inspiré probablement par la politique de “réconciliation nationale” en Algérie, le “Guide de la Révolution” a fait libérer en 2005 et en 2006 des membres du GICL détenus dans les geôles libyennes. (…) Mais, cette volonté d'intégrer les tenants de l'islamisme radical tout en donnant des gages aux Occidentaux n'est pas sans contradictions, dans la mesure où l'objectif des djihadistes (et de toute l'opposition libyenne en général) n'est rien de moins que le renversement du pouvoir. (…) Aujourd'hui, le fait que le GICL se soit affilié à l'organisation centrale d'Al-Qaïda plutôt qu'à sa branche “Mouvement d'Al-Qaïda dans les pays du Maghreb islamique” démontre la relation directe dont jouit le GICL auprès du leadership d'Al-Qaïda, qui comprend des Libyens de grande stature (…). Peut-on pour autant parler de la fin de l'islamisme radical en Libye ? Rien n'est moins sûr, car d'anciens membres du GICL, certes peu nombreux, vivent dans la clandestinité en Libye (…). Par ailleurs, l'élimination du groupe a contraint certains de ses membres à réviser leur stratégie et à rechercher une voie non violente. Mais les nouvelles générations de djihadistes ne sont pas prêtes à accepter un tel revirement, convaincus que seul l'usage de la violence est de nature à renverser le régime. (…) De plus, des militants islamistes, notamment liés aux Frères musulmans, sont toujours présents dans le pays. Certes, grâce à la redistribution de revenus pétroliers en hausse, le colonel Kadhafi peut se maintenir, sans trop de difficultés, au pouvoir, mais son opposition à toute ouverture démocratique et la répression menée au nom de la “lutte antiterroriste”, avec l'appui de l'Occident, risquent d'attiser davantage le mécontentement populaire et de pousser des jeunes désespérés à rejoindre la nébuleuse islamiste internationale djihadiste.
Y. H. Z.
(1) Extraits de l'analyse publiée dans “L'année du Maghreb ", Cnrs édition 2008 (Paris).
(2) Professeur en relations internationales et management et directeur de recherche en géopolitique, Euromed Marseille, Ecole de Management.


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