Même si beaucoup de familles reconnaissent qu'elles bénéficient de “bonnes” conditions d'hébergement, elles veulent surtout en savoir plus sur leur avenir immédiat. La salle omnisports de Staouéli héberge depuis près de deux semaines une quarantaine de familles sinistrées, certaines habitant la commune et d'autres venues de la daïra de Sidi-M'hamed, à Alger. Ce site, mitoyen au nouvel hôtel privé El Mehdi et situé non loin du luxueux hôtel Sheraton et de la résidence d'Etat du Sahel (Club des Pins), s'ouvre sur une grande cour, où est implantée une tente de la société des eaux, faisant face à ce qui est appelé communément “le poste de police”, qui est gardé par des éléments de la sûreté urbaine et de la Protection civile. Le bâtiment central abrite à présent “le bureau” de l'administrateur et la grande salle de basket aménagée en 41 box numérotés, où s'engouffrent les familles. Selon M. Boudemia, l'administrateur, la création des box avec du contreplaqué répond au souci de “préserver l'intimité de chaque famille”. Pourtant, cette promiscuité a cependant certains inconvénients qui inconfortent des sinistrés. “J'ai passé mon examen hier (mardi, ndlr),mais je n'ai rien fait, car je n'ai pas pu réviser ici avec tout ce bruit. Mais il n'y a pas que ça : je suis déstabilisée par le séisme du 21 mai”, confie cette étudiante en droit, qui a quitté le logement de Sidi-M'hamed avec ses parents, de crainte que l'immeuble ne s'écroule. Mais cette jeune fille n'est pas la seule à se plaindre du bruit, de l'amplification des voix et du son de la télévision, ramenée par certains “voisins”. Des personnes âgées, surtout les malades chroniques, des enfants et des salariés ayant repris le chemin du travail ont du mal à trouver le sommeil la nuit. “On ne peut pas tout avoir. El hamdoullah hagda wala ktar ! Il faudra patienter, le temps d'être relogé”, affirme une vieille femme de Staouéli, habitant la rue Kaïti-Ahmed du côté du siège de l'APC. Ses paroles, au lieu de calmer, produisent l'effet inverse sur les personnes qui l'entourent. “Ne rêve pas trop el-hadja, tu vas repartir chez toi, même si ta maison va s'écrouler. Tu n'es pas prioritaire par rapport aux sinistrés de Boumerdès et on dit qu'il n'y a pas de logements neufs”, lui rétorque une femme de Belcourt. À la salle omnisports de Staouéli, même si beaucoup de familles reconnaissent qu'elles bénéficient de “bonnes” conditions d'hébergement, avec douches, sanitaires et l'eau H24, elles veulent surtout en savoir plus sur leur avenir immédiat. À les entendre, aucun des responsables qui s'est présenté à ce site ne leur a donné de réponse “claire et définitive” quant au retour à l'ancienne habitation ou à un probable relogement. Cette situation handicape certains ménages qui ne cachent pas leur crainte de passer plusieurs mois dans cet endroit et qui ont du mal à assumer cette période de dépendance. “Soit on nous prend en charge correctement, soit on nous laisse cuisiner”, révèle une jeune dentiste, impatiente de revenir dans la maison paternelle, une fois que celle-ci “sera retapée”. Ce n'est pas le cas de cette mère qui jure de ne plus jamais franchir le seuil de son logement : “Je ne reviendrai jamais dans cette maison qui date de 1800 et qui menace de s'effondrer. Je me sens plus en sécurité ici avec mes trois enfants.” Un prothésiste dentaire, travaillant pour le compte d'un privé à Réghaïa, ne sait pas ce qui adviendra de son logement de Sidi-M'hamed. Mais il semble plus préoccupé par la démolition du cabinet dentaire, situé au bâtiment 8 de la cité Mafal (Réghaïa). “Celui qui a besoin d'un prothésiste peut me contacter ici, à la salle omnisports de Staouéli”, nous dira-t-il. D'autres sinistrés se sont rapprochés de nous, notamment des personnes souffrant de diabète, d'hypertension, de cancer du sein et de problèmes cardiaques. Selon elles, ce qui fait grand défaut dans ce site d'hébergement, c'est l'absence de médicaments pour les malades chroniques. Un point de vue partagé par l'infirmier et un des deux médecins présents. Quant au second praticien, il souligne que les médicaments d'urgence existent et que pour le reste, c'est aux patients de “prendre en charge l'achat de leurs médicaments”, exception faite aux grands malades. Alors, la qualité de sinistré fait-elle obligation à l'Etat de prendre en charge totalement celui-ci et pour une durée indéterminée ? La réponse n'est apparemment pas simple et M. Boudemia a du mal à expliquer la problématique. “Ecoutez, j'ai été désigné avant le 29 mai dans ce site pour le gérer, il y a ici environ 260 personnes qui n'ont rien perdu. Leurs logements ou leurs maisons présentent des fissures. Après les expertises du CTC, on saura qui sont les familles qui peuvent retourner chez elles et celles qui ne le peuvent pas. En attendant cette phase, les familles reçoivent leur petit-déjeuner, leur goûter et les deux repas. Elles bénéficient de soins urgents et de sécurité”, dit-il, puis de promettre “un coin lavoir” et “un coin cuisine” prochainement. H. A.