Khadidja était mariée depuis plusieurs années. Le mari choisi pour elle par son propre père n'avait rien du prince charmant de ses rêves. Hocine est un être brutal et violent, et surtout un soûlard invétéré qui la battait sans vergogne et l'empêchait de voir qui que ce soit. Même sa propre mère. Sa jalousie était telle qu'il décida de déménager dans une vieille maison à l'écart de la ville et bien loin de sa famille. Khadidja, qui avait déjà cinq enfants, ne pouvait faire autrement que suivre son fou de mari, et d'exécuter ses ordres. La voici donc loin de toute commodité et de tout confort dans cette maison de fortune, qui pouvait à peine les contenir tous les sept. Au XXIe siècle, Khadidja réapprit à s'éclairer à la chandelle et à puiser l'eau dans un puits situé dans un champs à proximité de la maison. Dotée d'un courage inébranlable et d'une patience de fer, Khadidja ferma les yeux sur sa triste condition et pria Dieu pour que Hocine s'assagisse et revienne à de meilleurs sentiments envers elle et ses enfants. Mais Hocine était bien loin d'eux, et s'adonnait plus que jamais à la boisson. Il dépensait la quasi-totalité de son salaire dans les bars ou en galante compagnie. Ses enfants abandonnèrent leur scolarité du fait de l'éloignement de leur résidence de la ville, et Khadidja faisait de temps à autre du ménage chez une voisine qui habitait à 4 km de chez-elle. Ses allées et venues se faisaient discrètement car elle savait que si Hocine venait à l'apprendre, il la répudierait ou, pire, la tuerait dans un moment de colère. Néanmoins, et grâce à la générosité de sa voisine, Khadidja arrivait à nourrir et à vêtir ses enfants qui étaient âgés entre 1 et 8 ans. Un jour, Hocine rentra plus tôt que d'habitude et trouva sa femme en train de faire sa lessive à l'extérieur de la maison. Il la sermonna et lui demanda de lui préparer un café. Une fois installé à l'intérieur, il s'allongea sur une natte et se met à regarder autour de lui. La chambre était propre et bien entretenue, mais ce qui le frappa surtout, ce sont les vêtements de ses enfants qui étaient presque neufs. Il s'approcha de la petite Aïcha, qui avait à peine 4 ans, et remarque que sa robe était très belle. Il fouina dans sa cervelle et se rappela n'avoir acheté quoi que soit à ces enfants depuis des lustres. Tout d'un coup, le doute l'assaillit. D'où viennent ces vêtements, ce café qu'il est en train de boire et cette nourriture que préparait sa femme ? Il se lève et son sang ne fera qu'un tour. La moutarde lui monta au nez et ses mains commencèrent à trembler. Il se saisit d'une bouteille de vin et la vida devant ses enfants médusés. Puis, s'approchant de Khadidja, il lui assena un violent coup de pied. Cette dernière roula par terre. Elle allait ouvrir la bouche, quand un coup de poing s'abattit sur son visage. - Salope, fille de chienne, fille de rue ! criait Hocine, tu me trompes avec le premier venu et sous mon propre toit. Tu te prostitues derrière mon dos. Khadidja se débattait autant qu'elle pouvait, les enfants sanglotaient dans un coin apeurés, mais Hocine intransigeant ne lâchait pas prise. Il tenait Khadidja par les cheveux et la traînait à ses pieds en alternant coups de pied, coups de poing et injures. Fatigué par sa course, il lui cogna la tête contre le mur avant de conclure : - Je vais te fendre le crâne espèce de p... attends un peu ! Il sortit de la maison à la recherche d'une hache. Khadidja profitant de ce moment de répit, prit son bébé hâtivement dans ses bras et poussa ses autres enfants devant elle. - Vite, courez-vite, allez vers le puits ! Les enfants s'exécutèrent et se mettent à courir de toutes leurs petites jambes. Arrivés au puits, ils s'arrêtèrent et interrogèrent leur mère du regard. Cette dernière les embrasse un par un puis les jeta dans le puits avant de s'y jeter elle-même. Le grand trou noir qui était à moitié plein d'eau les avala un par un. De retour à la maison, Hocine ne trouva personne. Il ressortit dans la courette puis fait le tour de la maison, mais en vain, sa famille s'était littéralement volatilisée. Il devint furieux et tenta de retrouver quelques traces de pas sur le gazon. Il parvint au puits et crut voir au fond le foulard rouge de Khadidja. Il ouvrit les yeux tout grands avant de comprendre tout d'un coup la terrible tragédie. Vite ! Il enfourcha sa moto et descendit en ville pour alerter les secours. Mais c'était déjà trop tard. Les agents de la Protection civile retirèrent deux heures après les corps glacés de Khadidja et de ses cinq enfants. L'image frappante de cette mère serrant ses enfants dans ses bras avait fait pleurer plus d'un. Hocine, après le drame, perdit la raison et mourut une année plus tard dans un asile psychiatrique. Y.H