L'écrivain Français Gustave Flaubert disait dans une de ses célèbres citations : “La théorie, c'est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. La pratique, c'est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi.” On est tenté de rajouter ceci : la communication de crise est une théorie pratique ! La communication est incontestablement la meilleure des thérapeutiques dans la gestion d'une crise. Une notion évoquée pour la première fois le 22 janvier 1885, lors d'une crise due à une surproduction de sucre dans le monde. Mais, ce n'est que près d'un siècle plus tard, au début des années quatre-vingts, que la communication de crise, en tant que matière, enseignée, adoptée et structurée, fut pleinement accueillie. Dès lors, elle est accompagnée d'une professionnalisation de l'offre de service à l'adresse des entreprises et institutions qui, nécessité oblige, lui ont dédié des directions internes. En Algérie, la communication de crise, voire sensible, n'a commencé à faire parler d'elle dans la presse, sous cette terminologie, que vers les années 80, spécialement après le séisme d'El-Asnam. Le traitement, alors de manière sporadique de la communication de crise, était un concept nouveau pour toute la presse internationale. À contrario, les agences de communication commençaient à l'afficher parmi leurs prestations de service. La communication de crise, chasse gardée des politiques ! La communication de crise en tant qu'entité publique, réfléchie et réalisée par un personnel politique a, grâce à sa professionnalisation, donné le ton à une notion de communication de crise en général. Désormais, même si le politique a toujours du mal à se retirer de son implication, le besoin de savoir, de se rassurer, d'avoir des explications, est entièrement ancré dans nos mœurs. D'ailleurs, certains experts avertissent des éventuels effets pervers de l'utilisation de la communication de crise. “Le plus grand danger de la communication de crise est de donner le sentiment qu'il ne s'agit que de communication.” (Thierry Libaert enseignant en science de la communication et de l'information, France). Allusion faite à l'utilisation abusive de la communication de crise, comme levier d'action de la part des gouvernements ou des entreprises, dans le but d'emporter l'adhésion des électeurs ou des travailleurs, soit en exagérant parfois de simples situations, ou inversement en minimisant des phénomènes avérés, plus graves. La crise financièremondiale, un simple avertissement ! Actualité oblige, on va s'arrêter sur la crise du moment, la crise financière mondiale. Partout dans le monde, son impact est plus ou moins ressenti et ses effets sont à l'origine de dramatiques conséquences socioéconomiques. Chez nous, on ose à peine parler d'avertissement. Une crise de dimension planétaire est, par le génie d'une communication requise, qualifiée de simple avertissement ! On aimerait tellement que tout le monde ait eu tort et que nous ayons raison. Mais en se voulant rassurant, les communicateurs disposent certainement d'éléments qui leur permettent de voir ainsi aujourd'hui. Néanmoins, n'étant pas tous placés sous un même angle de vue, on a du mal à le croire. Concernant cette situation et pour rester dans le domaine de la communication, c'est peut-être, plus à ce niveau-là, qu'une meilleure stratégie gagnerait à s'éloigner d'une relative démesure. D'autant que bon nombre de spécialistes algériens de la finance ne partagent pas la même analyse officielle de l'impact sur l'Algérie, de la crise financière dans le monde. Mais, les flops en matière de communication de crise ne sont pas nouveaux, on ne fait que perdurer dans le temps. Qui ne se rappelle pas des revendications sociales légitimes, en Kabylie (1980), noyées par le régime de l'époque, pour entretenir l'amalgame entre Kabyles et Arabes ? Il en fut de même en 2000 avec le défunt Massinissa Guermah. L'on n'a pas mieux communiqué, plus récemment à Chlef, ou ce qui aurait pu être une simple interpellation d'un citoyen a tourné à l'émeute ! Berriane, vers la même période. Ce qui devait être du ressort de la communication a été préféré au répressif. Oran et sa périphérie ont aussi passé leur mauvais quart d'heure, pour faute de communication, voire un détestable discours servi par des responsables, au demeurant, très éloignés de la réalité vécue par la population. Plus frais encore, les inondations à Ghardaïa. Là aussi un point commun, le déficit criant en communication et gestion de crise. Ce dernier concept, quand il est assimilé, introduit justement la notion de la prévention de tous les risques liés à une région en tenant compte de toutes ses spécificités. Plan Orsec, sans plan ! Encore plus surprenant, l'Algérie ne dispose pas de texte réglementant le plan Orsec (Organisation de la réponse de sécurité civile) pour la gestion des crises et des catastrophes. En un mot, sur le plan légal, les pouvoirs publics sont dans l'incapacité de déclencher un plan Orsec. Invraisemblable pour un pays comme le nôtre qui subit régulièrement des catastrophes naturelles. Un imbroglio juridique qu'il faudra mettre à jour sans délai. La communication de crise n'est pas du bricolage, même si ce n'est pas une science exacte. Quoique, on ne peut communiquer avec justesse que lorsqu'on connaît toute la vérité et rien que la vérité, débarrassée de tout le reste ! Or, chez nous, on occulte souvent la vérité pour ne laisser que le reste. C'est ce que semblent croire encore certains responsables et faiseurs d'opinion (médias lourds) notamment. Alors que la population en générale et la jeunesse en particulier, ont aujourd'hui, considérablement évolué grâce à toutes ces fenêtres technologiques ouvertes sur le monde. Le monde des nouvelles techniques de la communication et de l'information. Rabah Larbi