À mesure que le massacre contre la population de Gaza se poursuit, l'élan de solidarité et de compassion ne faiblit pas en Algérie. Il est attendu que des marches soient organisées au sortir des mosquées ce vendredi, mais aussi des stades où sont prévues des rencontres de Coupe d'Algérie. Mais, déjà, durant toute la semaine, les policiers ont joué au chat et à la souris avec les étudiants, mais surtout les lycéens à Alger. Ces derniers semblent déterminés à marcher et à braver les interdits. Les pouvoirs publics se retrouvent devant un sérieux dilemme : interdire systématiquement les marches à Alger au risque de voir la situation leur échapper complètement et profiter aux charlatans de tous bords ? Mais comment faire, lorsque les partis politiques — ceux de l'Alliance présidentielle en particulier — préfèrent déserter Alger pour clamer leur solidarité avec le peuple palestinien meurtri, et lorsque la société civile brille par son absence, faut-il laisser tous ceux qui veulent sortir et manifester le faire, sans encadrement aucun, sans itinéraire précis et sans mots d'ordre clairs ? Les lycées d'Alger sont en pleine effervescence et rien ne semble dissuader les futurs adultes à sortir dans les rues. Pas même les quelques interpellations opérées par les forces de l'ordre. Hier, encore, les lycéens des Sources ont bravé les interdits et sont sortis dans la rue, poursuivis par des policiers qui tentaient d'en extraire les meneurs. Une course-poursuite qui s'opère pratiquement devant la majorité des établissements scolaires, ajoutée à un quasi-bouclage des universités de la capitale. Le tout en attendant le vendredi de tous les suspenses. En effet, en plus des mosquées où l'hypothèse de voir les fidèles marcher après la prière du vendredi, il y a la reprise des rencontres de football, avec le déroulement des 32es de finale de la Coupe d'Algérie. Là aussi, l'on n'écarte pas la possibilité d'assister à des débordements à la fin des rencontres. Les forces de l'ordre resteront, donc, sur le qui-vive, et tout porte à croire qu'elles le demeureront jusqu'à la fin de l'agression israélienne contre Gaza. Mais, au-delà des appréhensions des uns et des autres, au sujet des marches de soutien et autres manifestations de solidarité avec la population de Gaza, cette douloureuse épreuve est venue remettre sur le tapis la question purement interne concernant la levée de l'état d'urgence, avec tout ce qu'il comporte comme restrictions pour l'expression plurielle. Les pouvoirs publics, qui essayent, par tous les moyens, de verrouiller Alger, avec tout ce qu'elle représente comme symboles, font, quelque part, le jeu des extrémistes qu'ils sont censés combattre. Car, on ne le répétera jamais assez, ce sont les frustrations qui nourrissent les rangs des extrémistes. Lorsqu'on laisse une jeunesse tout entière abandonnée à son sort et au doute, il ne faut pas s'étonner de la voir se comporter avec violence, dès que l'occasion se présente. On l'a vu dans les stades. On la voit, présentement, dans les rues. Azzeddine Bensouiah