Cinq mois après la promulgation de l'ordonnance n° 08-04 fixant les conditions et modalités de concession des terrains relevant du domaine privé de l'Etat, les textes d'application ne sont pas encore publiés. Les mises en concession d'actifs fonciers sont, ainsi, pour l'instant, bloquées. Pour un investisseur, le délai peut paraître un peu long, accentuant l'incertitude qui caractérise la gestion du foncier industriel en Algérie. Toutes les études sur l'investissement ont qualifié l'accès au foncier de contrainte majeure à l'investissement et donc à la relance économique. Mais au-delà de cette instabilité juridique (l'ancienne loi régissant le foncier industriel n'a duré que 8 mois et la nouvelle n'est pas encore mise en œuvre), les opérateurs économiques estiment que le dispositif ne règle pas le problème du foncier s'il doit conduire, avec l'introduction du mode des enchères publiques, au prix le plus élevé. L'Aniref dans son bulletin d'information estime que sur le plan financier, le régime de l'ordonnance octroie plusieurs privilèges qui font faire à l'investisseur concessionnaire des économies substantielles et lui permet des arbitrages subtils dans le financement de son projet. Le paiement d'une redevance locative, qui est la contrepartie de la jouissance du terrain concédé, est financièrement moins contraignant, moins lourd que le décaissement d'un prix d'achat, souvent prohibitif, en raison du caractère très spéculatif du marché foncier. Les économies ainsi réalisées peuvent être mobilisées pour financer le projet lui-même. Concernant la procédure des enchères, l'Aniref écrit que “les appréhensions des investisseurs, leur rejet épidermique des enchères publiques qu'ils soupçonnent de favoriser les puissances de l'argent au détriment des véritables investisseurs sont totalement infondés”. L'Aniref précise que “les enchères ne sont pas la cause du niveau élevé des prix mais le révélateur de l'état d'un marché dysfonctionnel et spéculatif. La mise à prix est, en fait, adossée à la valeur vénale du bien telle qu'elle résulte de la loi de l'offre et de la demande”. Ce n'est pas l'avis des opérateurs économiques. Pour eux le problème du foncier en Algérie est le résultat du différentiel du prix, qui constitue pour beaucoup une rente de situation. Certains indiquent que le foncier industriel est dix fois plus cher que dans les pays voisins. “Dans un monde spéculatif comme le nôtre, ce sont les puissances d'argent qui vont acquérir ce bien en première main, au détriment du véritable investisseur”, estiment les chefs d'entreprise. Les opérateurs économiques, confrontés au problème du foncier pour la réalisation de plusieurs projets d'investissement à forte valeur ajoutée pour le pays, regrettent même la manière avec laquelle le foncier a été géré. “On gère la pénurie au lieu de gérer l'abondance, alors que nous avons un très grand pays. En principe, il n'y a aucun problème de foncier en Algérie”, estiment-ils, accusant l'Etat “de créer la spéculation”. Les chefs d'entreprise plaident pour l'augmentation de l'offre du foncier pour qu'elle devienne excédentaire. M. R.