Les sociétés étrangères sont tenues d'avoir un associé algérien pour faire de l'importation. Un fichier des importateurs est en cours de création pour identifier les fraudeurs. Le gouvernement s'en va en guerre contre la fraude et le gaspillage sous toutes leurs formes, et s'emploie à travers une série de mesures à mettre en place un dispositif “d'assainissement et de régulation de l'activité du commerce extérieur”. La note est signée des mains du Premier ministre et bouleverse en profondeur la filière de l'import-import. Pas moins de quatre ministres sont destinataires de ces instructions qui portent sur “les mesures destinées à concourir à la rationalisation des importations de biens”. Comme premier verrou, ou règle de contrôle, le gouvernement fait ressortir dans le document qu'“à compter du 10 janvier 2009, l'ensemble des banques et les services des douanes nationales sont tenus de refuser toute domiciliation et toute opération de dédouanement de marchandises importées par un opérateur non détenteur du nouvel identifiant fiscal (NIF)”. Cette obligation réglementaire, qui vise la traçabilité de flux et de leurs acteurs, est ainsi confirmée comme un témoin fiscal et “est destinée à rétablir les normes universelles en matière de commerce extérieur …et à contenir les activités de revente en l'état préfinancées par le crédit bancaire”. L'objectif est double puisqu'il s'agit pour le gouvernement d'avoir un miroir fiable sur le segment des produits importés, qui sont destinés à être rendus en l'état, donc de pure connotation commerciale, et surtout il est question de voir plus clair quant à la propension exagérée des concours bancaires pour le financement du commerce extérieur au détriment de celui de l'économie. Les banquiers sont ainsi directement interpellés pour reconsidérer leur mode de financement pour des opérations d'import à caractère strictement commercial.Ce premier chapitre incombe directement, rappelle la note, au contrôle du ministre des Finances. Création d'un fichier des importateurs Première nouveauté, et pas des moindres, le gouvernement décide de l'instauration “d'un fichier des importateurs destiné à consigner toute infraction au regard de la législation douanière ou fiscale”, précisant encore que celui-ci sera alimenté par les douanes et les impôts, alors que les banques se doivent de le consulter avant toute acceptation de domiciliation des opérations d'importation. Ouyahia ajoute dans sa note que “la mise au point de ce fichier devra être diligentée… parachevée avant le 31 mai 2009”, plus que jamais et, pour une fois, l'interconnexion entre les banques, le fisc et les douanes trouve son expression réglementaire clairement signifiée. Toujours au chapitre du contrôle et des économies à gagner sur cette filière, une autre mesure vient redéfinir les conditions d'exercice de la mission des traders en Algérie. Ainsi, aucune société étrangère spécialisée dans l'importation ne pourra exercer en Algérie qu'à la condition d'avoir “une participation de personnes physiques ou morales algériennes à leur capital” et ce, avec 30 pour cent des parts, précise le texte. Cette obligation entrera en application à compter du 1er mars prochain et l'association d'un ou de plusieurs Algériens dans le capital de la société sera désormais exigée pour l'obtention du registre du commerce. Pour les autres sociétés qui exercent déjà, un délai est accordé jusqu'au 30 septembre 2009 pour se mettre en conformité avec le nouveau texte et trouver donc des associés algériens pour poursuivre leur activité d'import. Un texte plus explicite est attendu au niveau du ministre du Commerce avant le 31 de ce mois, ajoute Ouyahia qui instruit sur la lancée El-Hachemi Djaâboub “de préparer les textes destinés à prévenir et à interdire l'importation de tout produit représentant un danger pour la santé des consommateurs ou pour la sécurité publique”. Des normes pour lutter contre les produits superflus À signaler également l'institution des normes pour les produits d'importation, mission que Ouyahia confie à Temmar qui se voit “instruit de proposer des mesures destinées à renforcer les normes pour les produits susceptibles d'être importés et au développement des services de production de normes”. Le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements devra, selon les termes de la note, présenter ce dossier avant la fin du mois de février 2009. L'instauration des normes et leur définition revêtent un caractère stratégique dans la protection de la production nationale dans la mesure où c'est un instrument judicieux et objectivement opposable pour refuser aux frontières toute marchandise superflue et autres pseudo-produits. Le gouvernement a inscrit en priorité le ciblage des produits destinés a être revendus en l'état car susceptibles de véhiculer des risques de concurrence déloyale et porteurs de risque financier pouvant matérialiser une fuite de capitaux réglementaires. Sans tomber dans le protectionnisme, la mesure sur les normes permet de contenir les flux et les superflus en dégageant des économies appréciables sur la facture globale des importations qui, selon la note de Ouyahia, a connu une “progression intense… en hausse de près de 300 pour cent en six années”. Le sursaut du gouvernement s'explique également par “la marginalisation de fait de la production nationale, même de qualité sur son propre marché” et de l'existence de “règles du crédit favorisant l'activité de négoce au détriment de l'activité productive…” Face à ces enjeux de portée économique et de dimension sécuritaire également – s'agissant de mesures de sauvegarde et d'économie de devises —, Ouyahia insiste sur l'application de ces mesures et souligne l'impératif de leur “exécution précise et diligente”. Et de noter : “Aucun laxisme ou faux-fuyant ne sera donc toléré de la part de tous les concernés, qu'il s'agisse de membres du gouvernement, de responsables au niveau des administrations centrales et locales ou de dirigeants d'entreprise publique dans tous les secteurs et tous les domaines… y compris les banques.” Message on ne peut plus clair. Depuis l'ouverture du commerce extérieur de l'Algérie, jamais un gouvernement n'a eu à entreprendre une démarche aussi franche pour bousculer le “désordre” établi sur une filière aussi sensible que celle de l'import-import, et ce, en parvenant à réunir autant de responsabilités autour de l'enjeu par une obligation d'interconnexion et de traçabilité. ABDELKRIM ALEM