Si l'erreur médicale reste non répréhensible, la faute, en revanche, expose le praticien qui en est l'auteur à des sanctions pénales. Parce que la société algérienne a connu une grande mutation, les citoyens d'aujourd'hui refusent la fatalité que leurs aînés acceptaient stoïquement en invoquant à chaque dure épreuve subie la volonté de Dieu. Les algériens veulent désormais connaître les véritables causes du décès d'un parent. Bien plus, ils exigent des hôpitaux, une qualité de soins similaire à celle assurée dans les établissements de santé des pays développés. Certains vont jusqu'à ester en justice tout médecin qui aurait failli à sa mission. Il reste qu'établir une faute médicale n'est pas une chose aisée, car il faut en effet prouver que le praticien à sciemment provoqué une complication voire un handicap. S'il ne quitte pas l'hôpital bien guéri, le malade évoque alors l'erreur médicale, ignorant bien entendu que le médecin n'est pas tenu à l'obligation des résultats, mais à celle des moyens. Le médecin est, en effet, obligé de mettre en branle tous les moyens matériels en sa disposition et toute la science qu'il a acquise pour soigner les patients, il ne peut en aucun cas garantir les résultats, car le médecine n'a jamais été une science exacte. Mieux encore, selon de grands professeurs de par le monde, la médecine qui reste une science empirique a bénéficié de certaines erreurs pour évoluer. La stérilisation des blocs opératoires a été adoptée suite aux nombreuses infections dont ont été victimes les malades, et ce, jusqu'au début du XXe siècle. Le comptage des compresses avant et après l'acte chirurgical est devenu une obligation après un nombre incalculable de cas de surinfections consécutives aux oublis de consommables médicaux ou d'instruments dans le corps des patients. D'ailleurs, pour les conseils de l'ordre, l'erreur reste non répréhensible car il s'agit d'une “fatalité”. “Un médecin qui met à la disposition d'un malade tout le matériel nécessaire et auquel il prodigue les soins nécessaires, n'a pas commis de faute si le patient ne guérit pas”, affirme le Dr Bekat, président du conseil de l'ordre national des médecins. Pour ce praticien, la faute médicale est, par contre, répréhensible. “la faute médicale, c'est l'erreur que commet un médecin et qu'un autre confrère placé dans les mêmes conditions évitera”, ajoute le président du conseil de l'ordre des médecins. Les chirurgiens, qui avaient circoncis les enfants démunis à El-Khroub, il y a quatre ans, ont été condamnés pour faute médicale. Leurs pairs et la justice leur avaient reproché d'avoir pratiqué un acte chirurgical avec du matériel souillé et dans un endroit (le siège de l'APC), non aseptisé. Leur qualité de chirurgien leur permettait de réaliser une telle opération, mais leur conscience professionnelle aurait dû les interpeller et exiger que les opérations se fassent dans un bloc stérile. Le professeur, chef du service d'ophtalmologie de Béni Messous, a été pour sa part relaxé car en inoculant une drogue de chimiothérapie dans les yeux de patients atteints de dégénérescence de la macula, il n'avait fait que reproduire un acte médical tenté en dernier recours pour sauver des patients condamnés à la cécité eu égard à la gravité de leur affection. La faute médicale ne peut être établie que par un collège de médecins après expertise ou autopsie et si elle s'avérait, le praticien incriminé encourt une condamnation pénale et une interdiction d'exercer momentanée ou définitive, prononcée par un tribunal ou le conseil de l'ordre. Dans le cas d'une erreur médicale, le médecin est déclaré pénalement irresponsable, mais le patient lésé peut espérer une indemnité financière versée par la caisse auprès de laquelle l'hôpital ou la clinique privée a contracté une police d'assurance couvrant ce risque. Tous les établissements de santé, publics ou privés, doivent être assurés contre l'erreur et la faute médicale”, explique-t-il. Djafar Amrane