Aujourd'hui, Arzew se voit gratifiée, comme à l'accoutumée, d'un grand nettoyage et lifting, mais ses jeunes vivent la proximité de la zone industrielle comme une sorte de fatalité d'exclusion. Le président Bouteflika est annoncé ce 24 février à Oran et à Arzew pour une visite de précampagne où les symboles historiques pour cette date ne manquent pas, et se veulent autant de messages subliminaux que la Présidence veut faire passer. Deux mois à peine, en effet, après sa dernière visite dans la capitale de l'Ouest, qui avait coïncidé avec la tenue de la 151e conférence de l'Opep dans une conjoncture de chute des prix du pétrole, le chef de l'Etat et candidat à un troisième mandat, a volontairement choisi cette étape pour marquer de son sceau deux dates importantes dans l'histoire de l'Algérie : à savoir le 38e anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures et le 53e anniversaire de la création de l'UGTA. Quel lieu plus fort que la visite d'Arzew, “capitale algérienne des hydrocarbures”, le premier pôle pétrochimique d'Afrique, pouvait se prêter à un tel événement. Mais, aujourd'hui en 2009, que reste-t-il de ces symboles dans la mémoire collective des Algériens si ce n'est celui furtif du défunt Boumediene et de son lyrisme à l'époque du tiers-mondisme. 38 ans après, la nationalisation a été revisitée par la promulgation en 2005 de la loi sur les hydrocarbures. Tout un symbole, en effet, car cette loi faisait la part belle aux grandes multinationales étrangères, et il faudra un vent de nationalisation en Amérique latine et une opposition au contenu de la loi pour voir l'Algérie en amender ses principaux articles. Aujourd'hui, Arzew se voit gratifiée, comme à l'accoutumée, d'un grand nettoyage et lifting, mais ses jeunes vivent la proximité de la zone industrielle comme une sorte de fatalité d'exclusion. Le chômage dans cette commune est l'un des plus élevés de la wilaya. En 2005, de violentes émeutes y avaient éclaté faisant un mort parmi les manifestants et des milliers de dinars de dégâts. Elles avaient pour toile de fond le chômage, la hogra, des jeunes revendiquaient leur droit à installer des baraques pour exercer une activité commerciale dans leur cité “afin de subvenir à leurs besoins”. Commerce informel et illicite avaient jugé les autorités locales. Les premiers harragas tentaient d'émigrer à partir du port d'Arzew en embarquant clandestinement sur des pétroliers ! Sous les torchères des complexes qui crachent toujours leur fumée noire. Les enfants souffrent d'asthme, la prévalence de cette maladie est là aussi la plus forte dans la wilaya. D'ailleurs, lors de sa venue ce mardi, le président Bouteflika devrait inaugurer le programme de 100 locaux commerciaux à la cité Ahmed-Zabana qui avait été donnée comme un gage de paix sociale après les émeutes, le futur complexe d'ammoniac fera aussi l'objet d'une halte du Président. Mais l'on annonce surtout un grand meeting qui sera donné à la salle omnisports d'Arzew, en présence du SG de l'UGTA, et avec la mobilisation des comités de soutien au Président. La Centrale syndicale, créée en pleine guerre de Libération nationale, reste la plus fidèle d'entre les fidèles accompagnant toutes les politiques. En passant par les fermetures des EPE, dans les années 1990, les privatisations dans les années 2000 et son appui même lors de la promulgation de la loi sur les hydrocarbures. Aujourd'hui encore l'UGTA remplit plus son rôle politique ; son hégémonie syndicale dans le monde du travail ayant été depuis plusieurs années balayée par l'avènement de syndicats autonomes, certes corporatistes mais qui reprennent plus à leurs comptes les revendications socioprofessionnelles des travailleurs. Mais déjà l'image frappante de cette visite est cette ahurissante guérite placée au beau milieu d'un rond-point avec un gardien à l'intérieur, un préposé à la surveillance des fleurs... ! L'embellissement des ronds-points qui a fait surgir, la nuit, des fleurs et la pelouse, se doit d'être protégé contre les actes malintentionnés de quelques citoyens qui oseraient arracher des pâquerettes... djamila loukil