La présence du président de la République aujourd'hui dans la capitale de l'Ouest va donner un éclat particulier à la célébration du 24 Février, et Abdelaziz Bouteflika ne manquera sûrement pas d'évoquer la question cruciale de la dépendance énergétique ainsi que l'après-pétrole. Ainsi, il y va de certains moments dans l'histoire d'un pays où des anniversaires viennent sonner comme des à-propos indispensables et bousculer les lieux communs de l'information quotidienne. La date anniversaire du 24 Février en Algérie, cette année, en effet, renvoie forcément à la rente pétrolière et à la crise financière internationale, ou encore aux potentialités que recèlent les ressources du sous-sol du pays et les possibilités exceptionnelles à même de régler ces temps-ci la facture des importations, dont le montant record pour 2007 a caracolé autour des 25 milliards de dollars, sans que cela ne puisse nuire gravement aux finances publiques. Une chance inestimable pour le pays. L'Algérie continuant à exporter ses hydrocarbures en dollars et importer en euros, la dépréciation du dollar principale monnaie d'échange dans les transactions pétrolières internationales (de 33% entre 2002 et 2006) par rapport à la monnaie européenne ces dernières années, a pourtant alourdi l'addition. En tout cas, le 24 Février en Algérie a cette signification particulière en ce qu'il véhicule bien, du moins pour les initiés, la notion de souveraineté nationale sur les ressources stratégiques essentielles à l'activité économique, une notion si chère au 1er Novembre 1954, le Président défunt Houari Boumediene ayant définitivement tranché la question, il y a 38 ans jour pour jour, en déclarant la nationalisation pure et simple des hydrocarbures. Ces décisions historiques furent proclamées par Boumediene du haut de la tribune de la Maison du peuple, autre lieu symbolique où l'on célèbre habituellement l'anniversaire de la naissance, en pleine guerre de Libération nationale, de l'UGTA. Et la souveraineté nationale à travers la reprise du contrôle des ressources stratégiques se mesure aujourd'hui par les impacts économiques qu'a générés la hausse du cours du pétrole, le plus important étant pour l'Algérie une aisance financière sans précédent, à l'instar des pays pétroliers et gaziers, les réserves de changes passant d'environ 4 milliards de dollars en 1999 à 56,18 en 2005, 77,78 milliards de dollars en 2006 et plus de 110 milliards à fin janvier 2008, dues au cours du baril de brut. Une forte symbolique L'autre conséquence fut que de 30 milliards de dollars en 1999 et de 15,5 milliards de dollars en 2004, le stock de la dette extérieure est tombé à moins de 5 milliards de dollars fin 2006, soit environ 4% du PIB et 12% des recettes d'exportation. Autant que d'autres dates historiques, celle du 24 Février demeure liée par conséquent à une forte symbolique. Elle sert de référence à l'Algérie pour ne point renoncer à sa souveraineté sur ses propres richesses pétrolières et les livrer aux intérêts étrangers. Enfin, elle rappelle que les hydrocarbures sont la propriété du peuple et proclame, comme le fait souvent le président Bouteflika, que la génération actuelle a le devoir de s'inquiéter de l'avenir et de la survie des générations à venir. La preuve en est qu'un avant-projet de loi sur les hydrocarbures prévoyant la soumission de Sonatrach aux mêmes règles du marché que les compagnies étrangères, en ne réservant à la compagnie nationale que 30% du produit des gisements découverts par des partenaires étrangers, fut l'objet en 2001 de nombreuses oppositions et une levée de boucliers remarquable. Finalement, Bouteflika avait retiré ce projet de loi destiné à réintroduire les concessions d'avant 1971. La loi sur les hydrocarbures, malgré les avantages accordés aux investisseurs étrangers, place aujourd'hui l'Etat en tant qu'investisseur le plus important. Mais le vrai défi pour le pays reste, on le sait, celui de réussir la mutation de son économie en améliorant progressivement ses performances et sa compétitivité, comme le soulignent nombre d'experts algériens. C'est bien un 24 février célébrissime, il y a 53 ans, que naquit en pleine révolution, à Alger, l'UGTA. Ce fut aussitôt un véritable raz-de-marée. En 1956 et en pleine guerre de Libération, la Centrale syndicale rassembla en un temps record 72 syndicats, dans toutes les branches d'activité, depuis l'industrie jusqu'à la Fonction publique, comptant 110 000 adhérents et ce, seulement dans l'Algérois. Pourvu d'un organe de presse, l'Ouvrier algérien, le mouvement syndical engageait alors le combat tant sur le plan intérieur que sur le plan international. D'abord les représentants des travailleurs Dans ce contexte, la célébration de cet autre anniversaire du 24 Février qu'est celui de la création de l'UGTA devrait pour le moins témoigner d'une lente transformation cependant, de plus en plus évidente chaque année, de la centrale. L'engagement de l'UGTA avec à sa tête le défunt Abdelhak Benhamouda dans une mouvance démocratique et de lutte anti-intégriste avait notablement accéléré cette mutation, et les premiers représentants de l'UGTA au sein de l'APN, il y a plus d'une décennie, ont fini par placer l'UGTA historique dans une tendance plus marquée de “la prise en charge des préoccupations nationales” en plus des strictes préoccupations revendicatives du monde du travail. Ce fut un choix entériné et au fur et à mesure consolidé. Le déploiement de structures syndicales indépendantes par rapport à l'UGTA, moins fonctionnarisées, parfaitement présentes sur la scène nationale et activant dans plusieurs milieux différents, risque toutefois, et à plus ou moins long terme, de faire de plus en plus d'ombre à l'historique Centrale syndicale, voire de la confiner dans une autre dimension ; il s'agirait désormais de savoir laquelle… Z. F.