Après cinq semaines de grève générale, le collectif LKP appelle à durcir le mouvement en Guadeloupe où les négociations salariales entre les syndicats, le patronat et l'Etat piétinent. Le très médiatique chef de file du Collectif contre l'exploitation (LKP), Elie Domota, commence à avertir sur la poussée indépendantiste, estimant que les chances d'une solution en Guadeloupe sont toujours minces tant que le patronat d'origine européenne et l'Etat se renvoient la balle. Dans la partie de poker entre des patrons qui ne veulent pas entendre parler d'augmentations de salaires pour des Français d'outre-mer et le refus de l'Etat français de financer les hausses de salaires qu'il a reconnu justes, les Guadeloupéens menacent de brandir l'étendard indépendantiste. Depuis le début, c'est toute l'histoire coloniale de la France qui refait surface. On avait pensé que tout a été dit sur l'esclavagisme et l'exploitation de ces territoires à des milliers de kilomètres de la France hexagonale. Rien de cela, les événements de la Guadeloupe révèlent brutalement que l'ordre colonial n'est pas défait et que interpellé l'Etat français se débine pour reprendre l'expression du LKP qui a annoncé mardi la relance de la grève générale et la mise en place de nouveaux barrages routiers dans l'île. L'opposition française qui s'y est rendue alerte sur la situation, craignant le pire. L'Elysée et le gouvernement Fillon, qui semblent ne pas faire cas de cette perspective, ont vivement dénoncé la présence sur le terrain de la contestation de Mme Royal, la rivale malheureuse de Sarkozy à la succession de Chirac, et de Besançenot, le leader de l'extrême gauche, coqueluche des médias parisiens. Pour l'UMP sans voix devant le cahier des charges des Guadeloupéens, l'opposition s'adonne à une récupération politique indue : “Il y a la volonté de profiter de l'angoisse qui habite les Français pour faire de la politique de bas étage, de caniveau”, a dit un porte-parole du parti majoritaire de Sarkozy. Ce n'est pas secret, le président français qui a bâti son élection sur l'amélioration du pouvoir d'achat de ses concitoyens a échoué sur ce terrain, pris au piège de ses propres promesses. Le boomerang lui est revenu sur la face depuis un bon bout de temps déjà, d'où sa spectaculaire dégringolade dans les sondages. À peine un tiers des Français lui fait encore confiance ! Sarkozy aimerait bien allonger la prime des 200 euros exigée par le LKP mais il sait que son geste aura immédiatement un effet boule de neige dans la France européenne où les syndicats n'ont pas désarmés. Ils lui ont promis d'autres journées noires et ils le feront avec une population exaspérée par les promesses non tenues. Le préfet de la Guadeloupe, seul interlocuteur dans une crise avec des enjeux nationaux (!), ne s'est pas trompé en suppliant le LKP de tempérer ses demandes pour tenir compte des effets de contagion. Ses propos ont irrité Elie Domota qui a mis en garde contre une radicalisation du mouvement.