Les derniers chiffres publiés par le Cnis sur les échanges commerciaux de l'Algérie pour le mois de janvier 2009 font apparaître paradoxalement un excédent commercial de 1 milliard de dollars. La publication d'un tel chiffre mérite un examen spécifique car cela peut faire baisser la garde en termes de nécessité de maîtrise de nos importations, un train pouvant en cacher un autre. Contrairement à ce que peut laisser supposer une tel chiffre, nous aurons bien une balance commerciale déficitaire en 2009. Première indication à relever, les importations du mois de janvier 2009 se sont élevées à 3,07 milliards de $ soit une augmentation de 8,79% par rapport à janvier 2008. L'enseigne-ment est que l'extrapolation annuelle d'une telle tendance indique un niveau d'importation au moins équivalent à celui de 2008, c'est-à-dire 38 milliards de $. Ceci d'ailleurs quelles que soient les mesures de “restriction” prises par les pouvoirs publics car en économie comme en physique, il y a un effet de résilience. Au même moment Chakib Khelil, ministre de l'Energie et ex-président de l'OPEP, nous apprend que compte tenu de l'évolution prévisible des prix des hydrocarbures pour 2009, l'Algérie percevra seulement 30 milliards de $. de recettes pétrolières. En comparaison avec les recettes de 2008 (77 milliards de $.), c'est 40%. De plus les opérateurs et les spécialistes du commerce extérieur savent bien que le gros des opérations d'importation n'atteint son régime de croisière qu'au début du deuxième trimestre de l'année considérée. Cet excédent de 1 milliard de $. réalisé en janvier 2009 va finalement se dissiper et laisser place à un déficit commercial annuel en fin d'année de l'ordre de 8 à 10 milliards de $. Ajouté à cela le déficit récurrent de la balance des services aggrave la situation. On savait déjà lors de l'élaboration de la loi de finances 2009 sur la base d'une fiscalité pétrolière à 37 de $. qu'il y aurait un déficit budgétaire de 18% rééquilibré par le Fonds de régulation des recettes (FRR). Il faut savoir que l'équilibre budgétaire compte tenu de l'ampleur des investissements publics et des transferts sociaux suppose des recettes fiscales pétrolières basées sur un prix de 70 $ le baril. C'est dans ce contexte tendu qu'il faut décrypter les mesures de sauvegarde – car il faut les appeler ainsi – prises par le Premier ministre dans ses deux circulaires qui font tant de bruit auprès des partenaires économiques et dans les milieux d'affaires. À ce propos, le directeur général de la Chambre de commerce algéro-allemande de commerce et d'industrie (AHK) s'était senti impliqué, dans ma dernière chronique, dans une posture d'évaluation qui n'était pas la sienne. Telle n'était pas mon intention et j'en parle aussi parce que par ailleurs, il lui est reconnu un dynamisme fécond (formation management aux PME, appui aux exportations algériennes). Dans le reste du monde, les puissants s'organisent pour résister puis dépasser la crise, les plus faibles s'enfoncent davantage. Barack Obama appelle ses compatriotes dans son premier discours au Congrès à consentir des sacrifices mais à demeurer optimistes. Parmi les plus faibles, les pays de l'Europe de l'Est plongent dans la récession, y compris ceux ayant le mieux réalisé leur transition. L'Ukraine, la Hongrie et la Lettonie sont déjà placées sous perfusion par le FMI avec le soutien de l'UE. La Roumanie, qui a besoin de 7 milliards d'euros, se trouve en panne de liquidités mais hésite à recourir au FMI. Avec des balances de comptes courants déficitaires pour 2009, la Pologne (- 5,6% du PIB), la Slovaquie (-6,2%) et surtout la Bulgarie (-20,8%) ne sont pas mieux lotis. Cette situation est due en partie à une croissance économique assise sur les IDE et sur des systèmes bancaires performants mais sous contrôle Ouest européen (banques françaises, autrichiennes, italiennes, hollandaises, etc.). Ces groupes industriels et bancaires des pays de l'Ouest européen ont tout simplement rapatrié une partie des capitaux dont ils ont besoin chez eux, à l'instar de ce que s'apprêtent à faire les fonds souverains. Selon le journal français le Monde du 22-23 février 2009, la situation est si grave que la Banque mondiale “presse les Européens d'agir pour éviter” une nouvelle division “du continent vingt ans après la chute du mur de Berlin”. Pour rester dans ce registre, l'Afrique, continent oublié dans le traitement de la crise, vient enfin de voir inviter ses représentants (UA et Nepad) au prochain sommet du G20. Mieux vaut tard que jamais.