À en croire George Orwell, plus les temps sont mauvais, plus les démunis dépensent leur bon argent dans le superflu. Comment ne pas souscrire à cette affirmation, chaque jour confirmée par nos concitoyens qui se plaignent sans discontinuer de la cherté de la vie, sans pourtant pouvoir s'empêcher d'acheter à prix d'or des pétards et autres articles pyrotechniques pour leurs enfants, avec lesquels ils ne manqueront pas de s'amuser en lançant quelques-uns “pour leur montrer comment faire”. Sur les étals, il y en a pour tous les goûts et toutes les couleurs, pour les plus modestes bourses et pour les plus nanties. Les conséquences sont là. À Oran, le service des grands brûlés et de chirurgie plastique du centre hospitalo-universitaire aurait reçu plus de 60 blessés à cause des pétards. Si chaque année, on annonce la saisie de stocks entiers de pétards et parfois de pleins containers, il semble que l'appât du gain soit plus fort que la peur du gendarme, sans doute, puisque les pétards continuent à faire le malheur de nombreuses familles, non seulement à cause du gaspillage de sous indispensables à la survie des ménages, car, n'est-ce pas, il faut faire comme les voisins et dépenser de l'argent en pétards toujours plus gros, mais surtout à cause de blessures graves parfois, et souvent invalidantes. À Baghlia, une jeune fille qui se rendait à pied au lycée, tout en révisant sa leçon, a perdu un œil à la suite d'un jet de pétard sur son cahier. L'alerte rouge est régulièrement donnée par les pouvoirs publics à chaque Mawlid Ennabawi, en vain. En plus des vies sabordées à la suite d'un simple pétard, durant une fête qui aurait dû engendrer joie et recueillement, la collectivité doit supporter le poids d'une lourde prise en charge parfois lorsqu'il s'agit de traitement de longue durée de blessures aux yeux. Djamel Zidane