“Notre commune semble être oubliée des pouvoirs publics. Au moment où d'autres régions bénéficient de projet de gaz de ville, Illiltène semble être écartée de cette commodité vitale…” Située à 70 km au sud-est de la wilaya de Tizi Ouzou, la commune d'Illiltène demeure une région enclavée, cela malgré les multiples routes qui la relient à plusieurs grandes villes de la Kabylie. Aucun projet pour le développement économique, pourtant possible, en faveur de cette région toujours déshéritée. Rien de consistant ne se profile à l'horizon, ce qui a des retombées négatives sur les citoyens de la commune qui subissent les aléas du chômage, la difficulté, la cherté des produits, la malvie… Ceux-ci ne ratent aucune occasion de partir ailleurs, de tenter leur chance, quelquefois à l'aventure, surtout les jeunes. La débrouille se veut désormais une culture ; les possibilités s'inventent, quitte à aller très loin, sous d'autres cieux, bravant le risque et le péril. Le président d'APC de cette commune a une appréciation que justifient l'expérience et l'exercice de la responsabilité : “Notre commune semble être oubliée des pouvoirs publics. Au moment où d'autres régions bénéficient de projet de gaz de ville, Illiltène semble être écartée de cette commodité vitale…”, regrette-il, se demandant pourquoi ces carences, cet oubli injustifié ? “Pourtant, nous souffrons énormément des pénuries de ce combustible, notamment en hiver, connaissant des situations difficiles dues à la rigueur du climat, à l'altitude et l'enclavement durant cette période. Le gaz de ville est indispensable chez nous, vu les conditions météorologiques très rudes que connaît notre localité…”, ajoutera-t-il. Sur le plan des moyens économiques, il semble que tout reste à faire pour amener cette commune à un seuil régional à peu près décent afin de la soulager de son indigence. En dehors des projets réalisés dans le cadre des PCD, aucune initiative consistante ne vient apporter une solution viable à la crise qui touche notamment les jeunes de cette localité, plus de 60% de la population active est au chômage. Cette localité est loin de cheminer vers un développement durable, elle gère plutôt les aléas et les pénuries qui la pénalisent à plus d'un titre. Les quelques entreprises privées existantes œuvrent dans le domaine des travaux publics, l'offre d'emploi est insuffisante. Des entreprises que les jeunes dénigrent de plus en plus, car elles n'assurent ni l'avenir ni la couverture sociale, ni une activité durable, souvent en panne de réalisations. Des jeunes dans l'expectative Le tissu socio-économique se dégrade et n'offre par conséquent aucun travail durable ou rentable. Ce marasme touche principalement les jeunes qui ne demandent qu'à être entendus et qu'on leur offre l'occasion de démontrer leurs possibilités. Les jeunes, en effet, souffrent d'un manque réel de prise en charge, de soutien et d'encouragement. Dans cette localité, de nombreux problèmes pèsent sur cette frange sociale livrée à elle-même et qui, par dépit, a recours à toutes sortes d'expédients. Pour Hamid : “La vie est vraiment rigoureuse sur ces hauteurs oubliées du monde.” En effet, le manque de structures de formation et d'animation (salle de sports, maison de jeunes dotée de matériel approprié, centre de formation, etc.), les met en difficulté. Ajoutons à cela le chômage plus qu'ambiant faisant partie du quotidien : “… nous accompagnant comme une malchance partout où l'on espère un peu. Et l'on se demande pourquoi tant de suicides, de banditisme, d'agressions… pourquoi le taux de criminalité monte au lieu de descendre ! Pourquoi la débauche, la délinquance, la punition… Si l'Etat ignore que tous les maux dont souffre le pays sont proportionnels à ces carences en matière de formation, d'emploi, de salaire respectable et de niveau de vie, alors cela est grave”, nous déclare un jeune universitaire. L'enclavement en hiver En hiver, les montagnes croulant sous le froid et le givre offrent un spectacle digne de l'âge de glace. Sans moyens véritables de déneigement, la commune connaît des heures sombres, des heures de disette, la ramenant aux temps maudits où la famine et la maladie frappaient cruellement les populations démunies. En 2005, après 15 jours d'immobilisme, il a fallu l'intervention de l'ANP avec les moyens dont elle dispose pour ouvrir les routes, secourir les malades et acheminer le ravitaillement. L'opération de secours a duré plusieurs jours. À Illiltène, il a fallu porter des malades et des parturientes sur des civières et sur des épaules d'hommes pour les sauver de la mort. C'est une commune où il a fallu ouvrir des pistes dans la neige et la glace à coups de pioche et de pelle pour acheminer les maigres vivres dont on pouvait disposer dans les alentours… Les difficultés de ces régions de haute montagne sont assez connues aujourd'hui pour que l'on puisse y faire face. Les moyens financiers existent pourtant pour acquérir l'équipement adéquat qui leur permettra de s'ouvrir et de respirer dans l'éventualité de fortes tempêtes de neige. Ce qui manque, semble-t-il, c'est l'imagination, la prévoyance et l'initiative indispensables dans ce genre de situation. Où sont les bus promis par le ministre ? Promis depuis 2006, lors de sa visite dans la commune d'Iferhounène, les bus prévus par le ministre de la Solidarité nationale, M. Djamel Ould Abbès, ne sont pas encore arrivés à destination de la commune d'Illiltène. Celle-ci ne dispose que de deux minicars et d'un camion aménagé pour l'ensemble des élèves du CEM et du lycée. Un nombre insignifiant face à la demande de près de 2 000 élèves venant des 11 villages que compte la commune. Pourtant, la promesse avait été solennelle et tout le monde y a cru ! Comment réparer ce genre de bourde qui ne fait qu'ajouter à la désespérance et à la désillusion ?