Ils vivent entre ciel et terre. Et ils se nourrissent d'espoir et de solidarité. Ces deux mots résument à eux seuls le quotidien des habitants d'Illilten, une commune de la daïra d'Iferhounène, distante de 74 km à l'extrême sud-est de Tizi Ouzou. Depuis l'indépendance du pays, en 1962, cette contrée enclavée de la Haute Kabylie semble être quasiment oubliée des pouvoirs publics. Accrochés à cette majestueuse montagne du Djurdjura, les 14 000 habitants que compte Illilten ont en effet appris à se prendre en charge du mieux qu'ils peuvent pour survivre dans une région hostile à toute forme de développement. Situé à plus de 1000 m d'altitude, Illilten n'a presque aucun atout pouvant retenir ses habitants sur place. L'accès à la région est d'abord difficile. La seule route qui y mène est dangereuse à la circulation, surtout en période hivernale à cause du verglas. La moindre petite neige isole davantage une population qui ne sait pas à qui crier son désarroi. Si ce n'était l'argent des retraités de France, la misère serait encore plus grande lorsque l'on voit l'ampleur du chômage dans la région. A Igfilen, un petit hameau de près de 700 âmes, l'absence de l'Etat est des plus flagrantes. L'école primaire du village est construite sur un terrain acheté à un privé par les villageois. L'éducatrice qui s'occupe des enfants est payée par les parents qui déboursent 300 DA/par enfant/par mois. Le dossier de recrutement de cette jeune diplômée dans le cadre du pré-emploi est resté sans suite. Pour se rendre au collège d'El Had, le chef-lieu de la commune, les élèves se déplacent à pied sur plus de 3 km. Le problème d'alimentation d'Igfilen en eau potable est partiellement réglé grâce à l'aménagement de deux sources naturelles situées en haut du village. Mais chaque foyer a dû payer la forte somme de 30 000 DA. Le projet a coûté plus de 90 millions de centimes, apprend-on des membres du comité du village. Ces derniers affirment qu'une partie de leur village n'est toujours pas assainie. Certains foyers ne sont pas alimentés en eau et en électricité. « Les agents de Sonelgaz ne sont même pas venus pour faire les branchements nécessaires », dénonce l'un des riverains, un émigré en retraite. Les fiches techniques concernant l'aménagement du village, établies par les services techniques, sont restées sans suite, ajoute-t-on par ailleurs. Pour se chauffer durant la saison hivernale, les habitants d'Igfilen et de la quasi-majorité des foyers de la commune recourent à l'utilisation du bois. Certains sont contraints d'acheter ce bois chez les autres à 7500 DA pour un camion de petit tonnage. L'alimentation en gaz butane demeure insuffisante durant la saison hivernale où l'utilisation de ce produit est importante. En cas d'intempéries, la commune d'Illilten ne dispose que d'une seule pelle mécanique et d'un rétrochargeur. Le chasse-neige promis par les responsables de la wilaya de Tizi Ouzou n'est toujours pas livré. Les fortes neiges d'avril 2005 marquent toujours les esprits d'une population qui se dit être livrée à elle-même. En ce qui concerne l'alimentation en différents produits alimentaires, les commerçants d'Illilten se déplacent au marché d'Akbou, dans la wilaya de Béjaïa, distant d'à peine 30 km. En l'absence des pouvoirs publics, les habitants d'Illilten appréhendent mal la saison hivernale qui s'annonce déjà rigoureuse.