Echaudé sans doute par l'expérience de 2004, connaisseur du système, comme il se définit, Ali-Fawzi Rebaïne est convaincu d'ores et déjà que le scrutin présidentiel de jeudi prochain sera entaché de fraude. Hier à Alger, il a égrené un chapelet de griefs qui traduisent, à ses yeux, les contours de ce que sera l'issue du scrutin. “La campagne a commencé dans les médias publics depuis plus d'un mois. Le Président-candidat passait au JT de 20 heures plus d'une demi-heure. Il a un mandat qui ne finit pas. On n'a pas d'informations sur les bureaux spéciaux. Et toutes les institutions sont impliquées dans sa campagne. Aussi, je voudrais bien connaître les sources de financement de sa campagne. Il utilise également les ambassades”, a dénoncé le président de Ahd 54. Opposant sans compromission, pour reprendre sa rhétorique, ce fils de chahid, membre fondateur de la première Ligue algérienne des droits de l'Homme, Ali-Fawzi Rebaïne dit même avoir “honte” des pratiques du pouvoir politique. “Est-ce qu'on peut préparer l'élection dans ces conditions ? Moi, j'en doute. J'ai un peu honte pour mon pays qui reproduit les pratiques d'une république bannanière”, fulmine-t-il. Il jette même le discrédit sur le Conseil constitutionnel, lequel l'aurait spolié, selon ses dires, de plusieurs dizaines de milliers de signatures lors de la validation de son dossier de candidature. “Même les résultats qu'il donnera au lendemain de l'élection seront entachés de suspicion”, clame-t-il. “Ce rendez-vous historique a été raté par le pouvoir politique. Ils sont en train de mener le pays vers l'explosion. On peut faire l'économie de cette fraude. Il faut changer les traditions”, ajoute-t-il. Mais pourquoi dès lors participer ? “Je ne suis pas de nature défaitiste. Le combat est permanent. C'est grâce aux luttes pacifiques que beaucoup de systèmes ont été changés de par le monde”. Relancé plusieurs fois sur la question, Fawzi Rebaïne ressasse qu'il est optimiste et que la démission n'est pas de nature à rassurer une population en attente d'une perspective. Partisan d'un Etat moderne, Rebaïne, qui rappelle qu'il a été privé de télévision pendant cinq ans, préconise même le contrôle du budget de l'armée par le pouvoir politique. En d'autres termes, par le Parlement. “Mais pas l'actuel, car il est contrôlé par l'institution militaire”, précise Rebaïne. Une chose qui n'arrivera pas de sitôt puisque, selon lui, “le système a changé uniquement de décor, mais continue à se reproduire”. Le candidat de Ahd 54 s'est, par ailleurs, demandé “pourquoi l'Algérie continue à vivre sous l'état d'urgence”.