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Traduire, c'est trahir !
Publié dans Liberté le 27 - 04 - 2009

Assimiler l'acte de justice à un acte de traduction, c'est réduire de l'importance de l'institution en tant que garante de l'Etat de droit ainsi que du principe de l'égale accessibilité de la justice aux citoyens.
Pourquoi établir des lois et les justifier après ? Pourquoi ne pas anticiper sur les difficultés que pourrait provoquer un texte de loi pour qu'ensuite le législateur songe à apporter des mesures d'accompagnement ?
Dans le cas de la mesure portant arabisation des documents, que le justiciable est amené à présenter devant les tribunaux, la chancellerie a expliqué la nécessité du choix et de la politique d'accompagnement mise en œuvre depuis le 25 avril courant, dont l'installation de bureaux de traduction ainsi que le recrutement de traducteurs.
Mais cette loi semble obéir beaucoup plus à des considérations idéologiques que pragmatiques dès lors que l'administration, qui est censée faciliter la tâche au justiciable, la rend aujourd'hui encore plus compliquée.
Et l'on peut légitimement s'interroger sur la fiabilité des bureaux de traduction surtout lorsqu'on parle des affaires de justice où même la virgule a un sens, vu la sensibilité de la chose.
En même temps, cette loi reflète en quelque sorte le déficit du niveau des magistrats dont la formation universitaire est censée intégrer d'autres langues étrangères en plus de la langue nationale. Un magistrat n'est-il pas appelé à traiter des affaires liées au droit international, ou d'autres, où seraient impliqués des investisseurs étrangers installés en Algérie ?
Ainsi, un ressortissant étranger a-t-il le droit d'être accompagné par un interprète ? Dans le cas contraire, le juge prononcera-t-il l'incompétence de la juridiction en application de la loi ?
Assimiler l'acte de justice à un acte de traduction, c'est réduire de l'importance de l'institution en tant que garante de l'Etat de droit ainsi que du principe de l'égale accessibilité de la justice aux citoyens.
“Traduire, c'est trahir”, dit-on. Mais cet adage ne semble pas convaincre les initiateurs de cette loi dont l'objectif demeure la généralisation de l'utilisation de la langue arabe par tous les moyens au moment où la globalisation impose une conduite pragmatique des affaires de l'Etat.
À moins que le recrutement des traducteurs au sein des tribunaux s'inscrive dans la stratégie visant à lutter contre le chômage, notamment celui qui touche de plein fouet les universitaires algériens.
S. T.


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