C'est à l'initiative de l'Association des amis de Abdelhamid Benzine et en collaboration avec l'Institut de développement des ressources humaines (IDRH) à Oran, que s'est tenue une table ronde jeudi à Canastel autour de l'avenir des médias algériens. Intitulée “Les médias algériens : questions d'économie et de service public”, cette rencontre a vu la participation de nombreux conférenciers enseignants-chercheurs tels que les professeurs Brahim Brahimi, Belkacem Mostefaoui, Mazouz Rezigui, Belkacem Ahcène Djaballah, ou encore Ahmed Ancer d'El Watan… Devant un parterre composé en grande majorité d'autres universitaires et de trop rares journalistes, la problématique d'une approche de la presse du point de vue économique a, d'emblée, placé la rencontre sur des questionnements sur l'évolution des médias en Algérie, les enjeux et son devenir, que ce soit pour la presse écrite ou audiovisuelle avec cette notion d'économie et de service public. Le professeur Belkacem Mostefaoui abordera cette double problématique dans sa communication “Logique économique et de programmation de l'ENTV : questions de marchandisation et de service public” où il retracera les différents “âges de l'ENTV” analysant l'évolution de ses moyens de ressources. L'orateur parlera même de “copier/coller” et de mimétisme, les téléspectateurs devenant des consommateurs. Et de remarquer que dans le même temps l'ENTV, toujours investie de son devoir de service public, a recours de plus en plus aux ressources issues de la publicité des multinationales. De 2000 à 2005, la part de la publicité dans ces ressources est passée de 6% à 46 % dépassant les subventions qui ne représentent plus que 35%. “Comment faire valoir un service public de monopole avec des ressources externalisées ?”, s'interroge l'intervenant. Ahmed Ancer, pour sa part, situera l'aspect économique des médias à travers l'acquisition d'imprimerie par des éditeurs privés, retraçant les étapes qui ont mené des éditeurs à se doter de leurs propres moyens d'impression, pour se départir de la mainmise des pouvoirs publics dans ce domaine. Et de rappeler comment, à travers les imprimeries, les titres de la presse publique ont été maintenus en vie par opposition aux titres privés. “L'économie du secteur est devenue une économie de surveillance des écrits des journalistes”, dira ce dernier. De son côté, Brahim Brahimi retracera le long et difficile parcours des journalistes pour se doter d'un statut, d'une charte de l'éthique… “Le statut ne règle pas les problèmes, ce n'est là qu'un début. Les journalistes se doivent de mettre en place des conventions collectives, c'est indispensable pour les droits des journalistes, la promotion, la formation, les droits d'auteurs, la clause de conscience… c'est le dossier à venir des journalistes.” Et lui aussi, à son tour, d'évoquer “les pratiques négrières de certains éditeurs, les journalistes sous-payés, non déclarés, après dix ans d'ancienneté, un journaliste ne fait pas 30 000 DA !” Pour Brahimi, l'organisation des journalistes est tout aussi vitale. Et de parler d'autres expériences à l'étranger, où en plus du critère d'ordre économique, il est question de critères liés au droit des journalistes d'être associés au contenu du journal, à son orientation. “Dans ces cas, l'on remarque que le lecteur répond positivement à cette approche.” L'évolution des médias, pour Belkacem Djaballah, se situe aussi vers l'évolution actuelle de la presse écrite en Algérie avec l'apparition d'hommes d'affaires et d'entreprises qui créent leurs titres.