À partir de 1986, quatre facteurs extérieurs aggravants sont venus amplifier fortement le problème du service de la dette extérieure. C'est la baisse des recettes d'exportation due à la chute brutale des prix du pétrole qui sont passés de plus de 27 dollars par baril en 1985 à moins de 14 dollars en 1986. Les recettes d'exportations sont passées de 12,7 milliards US$ en 1985 à 7,9 milliards US$ en 1986, soit une baisse de 4,8 milliards US$. C'est, également, la variation des taux de change au détriment de l'Algérie, dans la mesure où plus de 90% des rentrées étaient effectuées en dollars alors que les dépenses étaient payées dans les autres monnaies. Près de 80% de l'augmentation du stock de la dette extérieure enregistrée entre 1986 et 1990 s'expliquent par la dépréciation du dollar américain par rapport aux autres monnaies. C'est l'effet inverse de ce que nous avons enregistré entre 1980 et 1984, malheureusement, au moment où la situation financière était devenue plus sévère. C'est aussi l'augmentation des taux d'intérêts réels positifs. C'est, enfin, la difficulté d'accès au financement extérieur à moyen terme des banques commerciales. C'est dans ce contexte que l'Algérie va vivre la période 1986-1988, caractérisée par la chute brutale des prix des hydrocarbures, le début des réformes économiques et le poids excessif de la dette extérieure. Comparées à leur niveau de 1985, les recettes d'exportation d'hydrocarbures ont enregistré une baisse de 39% en 1986 et 43% en 1988. Face à cette situation, trois options se présentaient pour le financement de la balance des paiements.Primo, honorer le service de la dette extérieure et emprunter à court terme pour couvrir les besoins d'importation ; secondo, payer au comptant les importations et accumuler des arriérés de paiement de la dette extérieure pour se placer dans une situation de rééchelonnement au Club de Paris et au Club de Londres ; ou tertio, réduire les importations à un niveau compatible avec le paiement du service de la dette ainsi que le paiement au comptant des importations courantes, mais alors ce seraient les pénuries généralisées et l'asphyxie de l'économie, compte tenu de la dépendance du pays du reste du monde pour les biens alimentaires et les matières premières et semi-produits. C'est la première option qui a été retenue, ce qui a débouché sur une aggravation des équilibres financiers extérieurs. Le ratio du stock de la dette extérieure au produit intérieur brut est passé de 30% en 1985 à 41% en 1988 et celui du service de la dette extérieure de 35% à 78% sur la même période. Les autorités ont réagi à cette nouvelle situation par l'adoption d'une réforme qui a touché l'ensemble des secteurs : la révision des méthodes de planification vers plus de décentralisation, la privatisation de l'agriculture, la suppression du monopole sur le commerce extérieur pour l'approvisionnement en intrants dans le secteur productif, la réorganisation du commerce extérieur, la réforme du système bancaire et monétaire, la réforme de la législation et de la régulation de l'investissement privé, la réforme de la législation du travail, la réforme |des finances locales et d'une manière plus globale, la mise en œuvre progressive des mécanismes de l'économie de marché, y compris le début d'une politique active de taux de change. Ces réformes, bien que touchant de nombreux secteurs, sont restées timides et confinées au niveau des textes législatifs sans une mise en œuvre perceptible sur le terrain. Elles n'ont surtout pas abordé le règlement des questions délicates de la stabilisation macro-économique et de l'endettement extérieur. Le déficit budgétaire se situait autour de 13% du PIB en 1988 et la liquidité monétaire, c'est-à-dire le rapport entre la masse monétaire et le produit intérieur brut a atteint 84% la même année. Alors la situation sociale s'est dégradée. La création annuelle d'emplois qui était de 130 000 nouveaux emplois en 1980-1984 est tombée à 74 000 emplois en 1986, 64 500 en 1987 et 60 000 en 1988. En 1987, les jeunes de 16 à 24 ans représentaient 26,8% du total de la population active et 70% de la population au chômage. La proportion de jeunes diplômés chômeurs augmente. En 1987, le nombre de finissants sortant de l'éducation et de la formation professionnelle était de 115 000 ; alors que la création d'emplois (formés et non formés) n'était que de 64 500 ! À jeudi prochain pour une autre question, entretemps travaillons toutes et tous à élargir la base du dialogue sur l'avenir de l'Algérie.