Parce que l'exigence de la repentance ayant été au cœur du discours officiel pendant près de trois ans, la dernière sortie publique de Abdelaziz Ziari n'a pas cessé de provoquer l'ire des membres de la Fondation du 8-Mai-45. Le président de l'Assemblée populaire nationale (APN), Abdelaziz Ziari, n'est décidément pas au bout de ses peines. Sa polémique avec Louisa Hanoune sur la problématique de la dissolution de la Chambre basse ne s'est pas encore tout à fait estompée qu'il entre à nouveau en conflit avec le président de la Fondation du 8-Mai-45, M. Kheireddine Boukherissa, sur la question hypersensible de la mémoire. La position exprimée par M. Ziari sur la repentance qui, dit-il, “n'est pas à l'ordre du jour”, a piqué au vif M. Boukherissa qui s'est fondu hier d'un communiqué de presse particulièrement violent. “La Fondation du 8-Mai-45 enregistre avec regret et désolation les propos de M. Ziari et dénonce fermement la légèreté avec laquelle ont été traitées les questions liées à la mémoire. Elles n'honorent ni l'Etat algérien ni le peuple algérien et encore moins son martyr et son histoire”, a-t-il dénoncé avant de faire le reproche au troisième personnage de l'Etat de s'être rendu coupable d'un “blasphème” et d'un “dérapage” qui appelle “explication”. Lors d'une conférence de presse animée, jeudi à Paris, pour clôturer sa visite de deux jours en France, le président de l'APN avait, en effet, ressorti un discours à mille lieues de celui servi jusqu'ici aux Algériens par certains officiels, à commencer par le président de la République Abdelaziz Bouteflika, le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem et… Ziari lui-même. En effet, M. Ziari avait soutenu, le 8 mai dernier sur les ondes de la Chaîne III, que la “France doit faire acte de repentance” pour les “crimes” commis par le colonialisme français “en Algérie et ailleurs” et a qualifié d'“ignoble” la répression des manifestations du 8 mai 1945 en Algérie. Ces déclarations sont en totale contradiction avec celles tenues à Paris ce week-end. La question de la repentance “n'était pas à l'ordre du jour” et “n'a jamais, depuis l'Indépendance, constitué un obstacle aux relations algéro-françaises”, a-t-il déclaré. Il est vrai que, le 8 mai 2009, le président Bouteflika s'est déclaré favorable à une “voie originale” qui permettra de “surmonter (...) les traumatismes causés au peuple algérien par l'Etat colonial français” même s'il n'a pas cédé sur l'essentiel considérant que “les discours récents sur le caractère prétendument positif du colonialisme (…) sont loin de contribuer à rétablir la vérité et à rendre justice à l'Algérie pour le mal que nous avons subi”. Parce que l'exigence de la repentance ayant été au cœur du discours officiel pendant près de trois ans, la dernière sortie publique de Abdelaziz Ziari n'a pas cessé de provoquer l'ire des membres de la Fondation du 8-Mai-45. “Nous exigeons des réponses nettes et précises. Parle-t-il pour lui, pour le peuple ou pour le Président ?” s'est demandé M. Boukherissa, avant d'enfoncer le clou. “Quand il minimise la portée d'une loi promulguée le 23 février 2005 qui positive le colonialisme en la réduisant à une simple provocation (…) il verse vraiment dans l'absurde.” Pis, M. Boukherissa est allé jusqu'à assimiler les déclarations de M. Ziari à de “l'indécence, voire de l'irresponsabilité”. “C'est que ce monsieur ne mesure pas l'importance d'une telle infamie à grande échelle et ses desseins occultes”. Les déclarations de M. Ziari sur l'UPM ne sont pas, elles aussi, du goût de M. Boukherissa qui dénonce les visées néocolonialistes du projet cher à Nicolas Sarkozy. “La France ne cherche qu'à instaurer son hégémonie et son monopole sur l'ensemble du territoire méditerranéen”, souligne-t-il avant d'enchaîner : “Elle réussira sa mission de recolonisation des pays récemment libérés tant qu'ils seront représentés par des personnes aussi insensibles qu'ignorant des martyrs et des souffrances endurées par leurs aïeux.” Aussi, le président de la fondation a décidé de s'en remettre au président de la République dans l'espoir de le voir rectifier le tir. “Nous demandons au président de la République d'intervenir et d'exiger du représentant du Parlement d'apporter des éclaircissements nécessaires”, a soutenu le président de la Fondation du 8-Mai-45 qui s'est dit s'interroger sur le recul de “la position officielle de repentance formulée par le président de la République lors de sa visite en France en 2000”.