Les milieux officiels marocains s'inquiètent sérieusement de la position de la nouvelle administration américaine vis-à-vis du conflit du Sahara occidental, laquelle n'accorde plus de priorité au plan d'autonomie avancé comme seule solution par Rabat, mais privilégie un règlement comprenant d'autres options. Alors que le royaume alaouite misait énormément sur le soutien américain, cumulé à celui de la France, pour imposer sa proposition d'autonomie comme seule solution au conflit du Sahara occidental, des informations en provenance de Washington font état d'une modification de la position américaine sur la question. En effet, à en croire le journal américain World Tribune, dont les informations ont été reprises par les médias marocains, contrairement à l'administration Bush, qui appuyait fortement le plan marocain, celle de Barack Obama soutient les efforts des Nations unies pour une médiation entre le Maroc et le Front Polisario dans le but de soumettre toutes les possibilités d'un règlement du dossier, y compris celle d'un Etat sahraoui indépendant sur le territoire, objet du conflit. Ce développement inattendu pour le makhzen inquiète sérieusement les milieux officiels marocains. Il faut dire que le changement dans la position américaine est important, si l'on en juge par l'appui inconditionnel qu'apportait l'ancienne secrétaire d'Etat américaine aux affaires étrangères, Condoleezza Rice, à la proposition de Rabat élaborée en concertation avec Paris. L'ex-responsable du département d'Etat américain avait approuvé la dernière mouture du plan d'autonomie et assuré les plus hauts dirigeants marocains du soutien de Washington à la démarche. Selon des sources diplomatiques dans la capitale américaine, l'administration Obama a ignoré cette solution à option unique et ne se considère plus comme engagée dans cette voie empruntée par sa devancière. Ainsi, les Etats-Unis semblent être revenus à leur précédente position, antérieure à l'arrivée de George Bush à la Maison-Blanche, qui laissait la porte ouverte à l'option de l'indépendance du Sahara occidental. World Tribune affirme, dans son édition du week-end écoulé, que Barack Obama a rompu avec la politique de son prédécesseur dans le traitement de la question sahraouie en mettant de côté un règlement basé seulement sur l'autonomie, préférant un référendum d'autodétermination, qui permettra aux Sahraouis de choisir entre l'indépendance ou l'intégration au Maroc. Toutes ces informations ont été mal accueillies par le gouvernement de Mohammed VI, d'où le démenti de son porte-parole et ministre marocain de la Communication, Khalid Naciri, qui a assuré qu'il n'existait aucun recul dans la position américaine dans le dossier sahraoui et que les analyses faites du récent message de Barack Obama au souverain chérifien étaient fantaisistes. Il n'en demeure pas moins que des spécialistes estiment que le fait que le monarque marocain n'ait pas reçu l'envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies, l'Américain Christopher Ross, lors de sa seconde tournée dans la région le mois dernier, traduit l'agacement du Maroc vis-à-vis de la nouvelle position américaine dans la gestion du conflit du Sahara occidental. L'émissaire onusien se serait même rendu dans la ville d'Oujda, après ses entretiens avec de hauts responsables marocains, pour être reçu par Mohammed VI, en vain. Et comme l'administration Obama accorde une grande importance à la réussite de la mission de Christopher Ross, elle ne verrait pas d'un bon œil ce genre d'agissements de la part de Rabat. Ceci étant, les discussions informelles entre le Maroc et le Front Polisario, prévues à la fin du mois en cours à Vienne, la capitale autrichienne, dans le cadre de la préparation du prochain round de négociations, nous renseigneront davantage sur l'avenir du conflit du Sahara occidental. Merzak Tigrine