Sous un ciel couvert par la brume, l'étoile de Gaâda Diwane Béchar a brillé très fort et très haut, avant-hier soir au Théâtre de Verdure de l'Oref. Une foule impressionnante a répondu présent pour ce concert unique du groupe qui se produira par ailleurs, les 5 et 6 août prochain, à Tlemcen. Gaâda Diwane Béchar sont pour la musique algérienne, ce qu'ont été Nass El Ghiwane pour la musique marocaine : une révolution mièvre et doucereuse. Avec leurs sonorités authentiques mêlés avec ingéniosité et adresse à de la musique moderne, le groupe Gaâda Diwane Béchar complet, accompli et au sommet de son art, a proposé avant-hier soir au théâtre de verdure de Riadh El Feth, un concert unique, exceptionnel, riche en couleurs. Le public – massivement présent – s'est délecté et déchaîné sur les rythmes entraînants de Gaâda, qui ont réussi à suspendre le temps et à nous offrir des fragments d'éternité avec une musique fusionnée à des textes puisés du fin fond du désert. Et c'est dans le cadre de la clôture du Festival Diwane, inscrit à son tour dans le cadre du 2e Festival culturel panafricain, que les amateurs de gnawi, “S'hab el Hal” et les avides de musique, se sont donné rendez-vous au théâtre de verdure ; et malgré quelques problèmes de la part de l'organisation dans la gestion de la foule, et après quelques minutes interminables d'attente, les musiciens sont enfin apparus sur scène. À leur tête, la sublime Aïcha Lebgae, vêtue dans une belle robe noire ; à leur tête également les deux frères et chanteurs du groupe Abdelaâti et Tayeb Laoufi : au karkabou pour le premier et au luth et le goumbri pour le second. Les trois chanteurs ont été accompagnés à la derbouka par Amar Chaoui, à la basse Ayoub, à la guitare Thierry Fournel, à la batterie Hervé le Bouché et à l'accordéon Hamdi. La foule qui commençait à s'impatienter a ovationné le groupe qui, sans la moindre transition, a entamé son tour de chant par Dib el ghaba : une chanson qui a enflammé la vague des spectateurs. D'ailleurs, ces derniers ont repris tous en chœur avec Tayeb, Aïcha et Abdelaâti, le refrain. Encouragé par les applaudissements et les ovations incessantes de l'assistance, le groupe Gaâda Diwane Béchar a repris les plus beaux titres de leur répertoire, notamment Amine, Foundou, Sidi Eghnime, Gourara, ou encore la sublime Soubhane Ellah – une reprise de Ness El Ghiwane – avec l'istikhbar magnifique qui l'accompagne. La voix enchanteresse et angélique de Aïcha Lebgae a revisité la complainte Taguerebt, puisée dans le patrimoine d'Ahellil. Comme une prière, les textes ancestraux et millénaires de ce titre se sont divinement bien mêlés aux sonorités modernes qui frisaient le blues. Au fil des chansons, et entre un titre et un autre, Tayeb et Abdelaâti s'adressaient au public, en saluant l'africanité retrouvée de l'Algérie. Comme toute bonne chose à une fin, le concert a pris fin aux environs de minuit ; mais minuit ne porte malheur que dans les contes de fée, et c'est pour cette raison que le groupe a interprété – après avoir salué le public – son titre phare : Ben Bouziane. Un finale grandiose et en apothéose. La fin n'a laissé personne sur sa faim puisqu'il y avait tellement de générosité qu'il est impossible, voire inconcevable de sortir du concert insatisfait. Il y en a qui se sont purifiés, d'autres qui ont exulté et d'autres encore qui ont retrouvé leur centre. En effet, le collectif de Gaâda Diwane Béchar nous a offert un voyage exceptionnellement incessant entre le profond et le profane, la tradition et la modernité, hier et aujourd'hui… en attendant leur prochain album prévu pour la rentrée prochaine. Sara Kharfi