La fille terrible de Béchar, la blueswoman du Sahara, la nomade du diwan et du rock d'ébène et d'ivoire, Hasna Bécharia, la « riot girl » (rebelle) du Sud, a mis le feu, dimanche, au « bois » du théâtre de verdure de Riadh El Feth. Oui ! Hasna (beauté divine, en arabe) a franchement charmé et enflammé le théâtre de verdure de l'Oref. Et pour cause ! Hasna la fille de la balle de Béchar a envoûté la faune de jeunes affichant leur appartenance manifeste et ostentatoire en tant que « gnaouine », adeptes de la musique gnaouie. Aussi, Hasna Bécharia a offert un transport, un « trip » à son bon public acquis à son atout « ravageur » : le rythme ! Et les fans n'ont pas été déçus de ce voyage au bout d'une nuit fauve ! Une belle session électro-acoustique à la manière des Unplugged de MTV. Assise sur un tapis, entourée de musiciens évoluant excellemment, Hasna observera des haltes sahariennes avec Smaâ, Smaâ, un titre atlassien, choral, dépouillé et pas du tout assourdissant pour les « feuilles » (oreilles) ; Hakmet lakdar (à ne pas confondre avec celle de Dissidenten, l'ancien groupe de Hamid Baroudi), une chanson polyphonique, féminine et délicate, parlant des valeurs cardinales de la famille ; Koulchi aâla el walidine est dans la même veine filiale prônant le respect des parents. Ma aândi fayda, une sorte de manbo effréné exécuté sous la bonne intelligence et compagnie de riffs électro, bas et acoustique, batterie ; Galbi Ya Galbi, Zhrek Aâla Zahri, une ballade bébouine et maghrébine, un hommage à son frère Bachir, et l'incontournable, le très demandé et remuant Djazaïr Djouhara, une ode déclarée et déclamée à l'endroit de sa patrie natale. Un concert s'articulant en deux parties. Celle roots (racines) en guise de « gaâda diwan Béchar » où elle jouera du goumbri (guitare traditionnelle dans le diwan et gnaoui) et celle électro, avec sa guitare, mêlant un tempo diwan, chaâbi, marocain, maghrébin et groove électrifié. Et puis, cet instrument omniprésent : la voix suintante et chaleureuse de Hasna. Touchée par la vitalité et l'attention du public réagissant d'une manière infernale. Une transe... saharienne d'une grande dame de la musique algérienne et maghrébine. C'est sûr, Hasna Bécharia est une sister soul ! Dont acte ! A propos du goumbri, son instrument sacré, Hasna Bécharia en parle avec dévotion : « Le goumbri est un instrument traditionnel conçu pour les hommes. C'est très difficile. Parce que le goumbri nécessite la force d'un homme et non celle d'une femme. Dans ma prime jeunesse, mon père ne voulait pas que je joue du goumbri parce que c'était un instrument masculin et non féminin. Je n'ai retouché au goumbri qu'en 1999, depuis que je suis en France. Quand je joue, au nom de Dieu, je fais mes ablutions d'abord avant de toucher le goumbri. Même quand je suis fatiguée, Dieu et le Prophète Mohamed m'aident. J'ai la force pour cela. Rabi Moulana (Allah). Cette force, c'est une grâce de Dieu. Quand je joue du goumbri, je suis en transe. Avant et après le concert, on est toujours en fête. Cela vient de Béchar. La musique est une thérapie. C'est dans les veines et le sang... » Juste à côté l'esplanade de Riadh El Feth, le plus grand espace d'expression directe et musicale du Panaf'2009 accueillait Joe Batoury, le leader, chanteur et instrumentiste (« gumbriste »). L'esprit de l'âme sœur, Hasna Bécharia, se perpétuait et se prolongeait. Ainsi Joe, comme aiment à l'appeler ses fans, a vraiment assuré. Et ce, de par une aisance sur scène. Il monte et démontre qu'il est aussi un enfant de la soul et du diwan. Lui, le kid, l'ex-rappeur de la tribu (posse) BLD (Belcourt Long Dynasty). Le clou de la soirée mettait à l'honneur le Sénégal. Et l'ambassadeur n'était autre que le chanteur Ismaël Lo. Un bluesman, un folk singer et un fils de... pop ! Une sorte de Robert Cray, guitariste et chanteur américain de blues, qui embrase l'esplanade de l'Oref et ce, de par des rythmes endiablés allant de l'afro-beat à la rumba zaïroise en passant par le steady rock jamaïcain ou encore la pop mélodique britannique résumant sa discographie. Le public, en délire, s'éclate avec Sénégal, L'amour a tous les droits, Jammu Africa, La Ilah Ilallah ou encore avec son fameux succès Tajobone repris mot par mot par son « fan-club ». Jammu Africa est un hymne à la paix et fraternité : « Afrika mon Afrique/D'ici ou d'ailleurs nous sommes des enfants d'Afrique/Même si le ciel tombait luttons pour la paix/Ici ou ailleurs la paix prix du bonheur/Même si le ciel pleurait luttons pour nos frères... » Commentant ce titre, Ismaël Lo s'adresse au public : « Je parle pour la paix en Afrique et pour que les enfants vivent en paix. Je voudrais chanter cela à Alger... » C'est sûr Ismaël est un écorché vif à la voix douce et d'une grande sagesse ! C'était show bouillant au Panaf' ! Et puis, des speeches de futurs « présidents » !