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L'ère de l'austérité commence
Suite aux récentes mesures prises par le gouvernement
Publié dans Liberté le 08 - 08 - 2009

Ces dispositions consacrées dans la LFC 2009 viennent importuner le simple citoyen et lui annoncer les durs moments qui l'attendent à l'avenir.
L'ère de l'austérité et de l'impopularité pour laquelle Ahmed Ouyahia s'est fait tresser des couronnes de la part de sa hiérarchie dans le passé, au détriment de la couche moyenne de la population, est de retour aujourd'hui. L'heure de serrer la ceinture vient encore une fois de sonner. La scène socioéconomique du pays, dépitée et désarçonnée par tant de vaines mutations, continue malgré elle d'en subir les conséquences. Rien n'est moins sûr toutefois que cette force d'inertie résistera éternellement. De nouvelles mesures plus drastiques viennent importuner le simple citoyen et lui annoncer les durs moments qui l'attendent pour le restant de sa vie. Autant de décisions rigoureuses émanant d'un gouvernement désireux, semble-t-il, de remettre de l'ordre dans cette vaste “esplanade commerciale” qu'est le marché algérien. La victime, devenue coutumière de cette frugale politique, n'est autre que le petit peuple. Celui-ci n'est apparemment pas au bout de ses peines. Preuve en est, l'Exécutif vient de lui arracher ce salvateur outil lui permettant de mener une vie plus ou moins décente avec comme finalité un certain confort tant convoité de longues années durant, à savoir le crédit à la consommation. Le Premier ministère semble échaudé par les méfaits de la crise financière qui a secoué les nations les plus puissantes du monde. Ce qui battra en brèche toutes les arguties avancées au lendemain de la crise par les hauts responsables de l'Etat sur l'absence de conséquences négatives sur le pays. En termes plus clairs, l'Algérie, faut-il le préciser, n'est pas à l'abri des retombées de la crise des subprimes. Et cette réalité est confortée par les faibles revenus pétroliers qui ont subi une baisse inattendue de plus de 52% pendant le premier semestre de l'année en cours. Et cette crainte a poussé le gouvernement à interdire les prêts à la consommation. Il appréhende en fait le surendettement des ménages qui risque de dépasser les normes requises en la matière. Il faut savoir que le recours de plus en plus au crédit à la consommation, qui a causé le surendettement de quelques milliers d'emprunteurs algériens, risque de produire, s'il n'est pas maîtrisé, le même scénario que celui vécu en Amérique.
Eviter le surendettement des ménages et réduire les importations
Le crédit particulier (ou à la consommation) ne représente que 8 à 10% des portefeuilles. Ce qui équivaut à plus de 210 milliards de DA sur 2 300 milliards de DA d'engagements et de crédits à l'économie aux entreprises. L'Algérie fait face cependant à un marché en pleine émergence qu'il faut pouvoir surveiller de près. Ce type de crédits nécessite à la fois une maîtrise parfaite du budget familial. Ainsi, les 700 000 créditeurs recensés doivent avoir cette culture de l'endettement. On n'en est pas encore là. Car, sur les 210 milliards de crédits aux particuliers, accordés en 2008, deux tiers, soit 140 milliards de DA, sont des prêts à l'immobilier. Or, ceux-ci constituent un investissement pour les personnes et les ménages. C'est aussi un investissement qui permet aux entreprises, notamment celles du bâtiment, de fonctionner. Le crédit aux particuliers lorsqu'il est rattaché à des investissements et à des productions dans le pays conduit vers un cercle vertueux parce que la demande augmente et par là même le marché se développe. En revanche, quand le crédit concerne les biens importés et surtout non maîtrisés, il peut se transformer en cercle vicieux. L'Etat estime que la maîtrise de l'endettement évitera des impayés aux particuliers et une défaillance à la banque. L'Exécutif n'a pas besoin, en principe, de recourir à ce genre de mesures d'autant plus que la centrale des risques, dont l'installation est prévue en 2009 au sein de la Banque d'Algérie, permettra aux établissements financiers de vérifier à tout moment le niveau d'endettement d'un ménage. Une chose est certaine, la couche sociale moyenne qui constitue la locomotive de toute société va à coup sûr réduire sa consommation. Si à travers cette interdiction, l'objectif recherché par le gouvernement est de réduire les importations, il n'en demeure pas moins que la réduction ciblera aussi la production nationale. Le produit fabriqué localement devrait être au préalable soutenu par une consommation interne. Et si celle-ci vient à manquer et n'est pas encouragée par l'octroi de prêts aux ménages, comme cela sera le cas dans un avenir proche, la production nationale recevra un coup fatal. Si l'on prend l'exemple de l'Eniem, pour ne citer que cette entreprise dont on veut faire un champion industriel, une Société économique de développement (SED) ne peut assurer sa survie si ses produits ne sont pas consommés. Elle ne peut vivre que des gains de sa production. Face à cette interdiction, l'Etat usant de son pouvoir régalien veut promouvoir le crédit immobilier. Certes, la pression sur le logement pèse encore de tout de son poids dans notre pays, néanmoins, rien n'a été fait pour l'atténuer. Et cette réorientation des crédits vers le logement n'a pas été suivie d'avantages considérables. Les conditionnalités restent toujours plus sévères. De prime abord, et à la lecture des dispositions de la LFC 2009, seuls les fonctionnaires peuvent bénéficier de prêts pour l'acquisition, la construction ou l'extension d'un logement avec un taux d'intérêt bonifié à 1%. Or, l'écrasante majorité des demandeurs ne peuvent se permettre un toit compte tenu de la flambée des prix.
Un crédit immobilier aux dérisoires avantages
Les F3 avoisinant les 700 millions de centimes ne pourront jamais être à la portée du simple citoyen. L'exigence de payer 10 à 20% de la totalité du prix du logement ne fait, en outre, que dissuader le citoyen et le forcer à renoncer à son projet. Les banques vont-elles enfin jouer le jeu ? Rien n'est moins sûr car il est de notoriété publique qu'elles ne prêtent qu'aux riches. À vrai dire, dans la majorité des cas, cette catégorie (riches) n'a même pas besoin de prêts pour leurs multiples consommations. Leurs moyens leur donnent toute latitude de payer cash leurs convoitises. Le rigorisme du Premier ministre a même ciblé la consommation quotidienne du citoyen en téléphonie mobile. La LFC 2009 a, par ailleurs, institué une taxe applicable aux chargements prépayés (cartes et Flexy). Elle est due mensuellement par les opérateurs de téléphonie mobile, quel que soit le mode de recharge. Le taux de la taxe est fixé à 5%. Dans un autre chapitre, l'Exécutif semble décidé à limiter le crédit aux particuliers. Le consommateur pourra-t-il ainsi bénéficier de promotions à l'avenir avec une telle mesure ? Les annonceurs activant dans ce secteur vont certainement devoir réduire leur budget publicitaire. Par ailleurs, certaines dispositions de toute cette batterie de mesures, consacrées dans la LFC 2009, visent à promouvoir l'investissement et la création d'emplois, si l'on tient compte de la version officielle. Mais elles favorisent dans le même temps le protectionnisme économique, en vogue actuellement de par le monde. Sinon comment expliquer l'utilité de quelques articles de la LFC qui imposent aux investisseurs et importateurs étrangers de s'associer avec des partenaires algériens au moment où l'Algérie a le plus besoin des IDE (Investissements directs étrangers) ? Cette contradiction entretenue par les pouvoirs publics avec tous ses démembrements quant à la rétroactivité ou pas de la mesure des 30% d'ouverture du capital des sociétés d'importation étrangères activant en Algérie ne fait qu'envenimer la situation. Cette confusion touche également l'article imposant aux investisseurs étrangers la cession de 51% de leur capital à un partenaire algérien. Déjà frileux et attentistes jusque-là, qu'en sera-t-il une fois que cette mesure leur sera appliquée concrètement ? Reste à savoir à présent si ces condescendantes décisions prises par le Premier ministre seront moins coûteuses que la crise elle-même.
Badreddine KHRIS


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