Une interprétation tendancieuse au niveau du Trésor public de l'article 25 de la loi sur le moudjahid et le chahid, amendée en 2008, couplée à une coordination défaillante avec les services compétents du ministère des Moudjahidine, bloque les pensions des filles de chahid veuves dont la mère est décédée. Au niveau des services des pensions des moudjahidine et des ayants droit au siège du Trésor public, plusieurs femmes, venues encaisser leurs pensions de filles de chahid veuves, se mettent dans tous leurs états dès lors que les agents du service leur rétorquent qu'elles n'ont pas droit à la pension instituée par l'article 25 de la loi sur le moudjahid et le chahid, amendée en 2008. Le motif invoqué : elles bénéficient de la reversion de la retraite de leurs défunts maris, ce qui leur fait, au regard de ces fonctionnaires, une source de revenu. La détresse de ces femmes est d'autant justifiée que la pension de retraite est dans la majorité des cas nettement inférieure à la pension due aux filles de chahid. Plus incongru encore, les filles de martyrs, dont la maman est encore en vie, continuent à percevoir leur pension complémentaire de 15 000 DA par trimestre pour les mariées et 21 000 DA tous les trois mois pour les veuves, les célibataires et les divorcées, et ce, quel que soit le niveau de leurs ressources. Pourquoi priver alors celles dont la mère n'est plus de ce monde d'un revenu supplémentaire attendu impatiemment pour payer les factures en retard et suppléer aux dépenses des fins de mois difficiles ? Sauf si les agents du Trésor fournissent délibérément des renseignements erronés aux personnes concernées par leurs prestations au moment où ils leur demandent de présenter des documents attestant de la non-affiliation à la Caisse nationale de la sécurité sociale ou la Casnos. D'autant que l'article 25 de la loi sur le moudjahid et le chahid est clair. Il dispose “du transfert de la pension de la veuve de chahid après sa mort aux garçons sans travail ou sans revenus et aux filles de chahid célibataires, divorcées ou veuves et de la partager entre eux en parts égales”. D'autant qu'une source au ministère des Moudjahidine a certifié que les dossiers des enfants de chouhada ont été traités dans le strict respect des nouvelles dispositions de la loi et transférés au Trésor public pour parachèvement de la procédure, particulièrement le paiement des pensions et des reliquats. À la Direction des moudjahidine de la wilaya d'Alger, on nous explique davantage les mesures d'application de l'article 25. Il s'avère que les enfants mâles des martyrs ouvrent droit, en vertu des amendements introduits dans la loi du moudjahid et du chahid, à la pension principale et la pension complémentaire (retraite) de la mère décédée pour peu qu'ils soient au chômage et sans aucun revenu. À ce titre, ils partagent, à parts égales, ces deux pensions d'une valeur de 54 000 DA chacune par trimestre, avec leurs sœurs veuves, divorcées ou célibataires. La seule nuance, les filles de chouhada veuves, bénéficiaires d'une reversion de la retraite de leurs maris décédés, n'ont pas droit à la pension complémentaire de leur mère. À vrai dire, si elles ont largement le droit de cumuler jusqu'à cinq pensions instituées par le ministère des Moudjahidine (pension de filles de chahid veuves avec la pension de mari de chahid ou de moudjahid mort avec la pension de moudjahida, à titre d'exemple), elles ne peuvent pas percevoir une pension de la Caisse nationale de retraite couplée à une pension de retraite attribuée aux moudjahidine ou aux ayants droit de chouhada. Les dossiers de ces dernières seront, dans la logique de la procédure, renvoyés au département des ayants droit au ministère des Moudjahidine pour réévaluer leurs pensions avant d'être transmis à nouveau au Trésor. Le hic est que les démarches administratives y afférentes sont excessivement longues. À chaque étape et dans chaque service, des mois s'écoulent avant que le dossier ne reçoive le traitement qu'il requiert. Dans certains cas, deux ans sont passés sans que la situation ne soit régularisée. Pour les femmes rabrouées, hier matin, par les agents du Trésor – et certainement pour des milliers d'autres —, l'attente sera encore longue. Souhila H.