Dans le cadre des rencontres “Les mille et une news”, initiées par le quotidien Djazaïr News, un débat autour de la réalité de la danse chorégraphique en Algérie, animé par le danseur Habib Tata, a eu lieu avant-hier soir à la librairie Socrate News. La rencontre a tourné autour de la problématique de la danse en Algérie et de la difficulté d'être pris au sérieux dans le pays, lorsqu'une personne s'illustre par cet art. Le danseur Habib Tata (également directeur de la compagnie Mazghen ), a entamé son propos par son actualité ainsi que par une brève présentation de ce qu'est la danse moderne. En effet, il a déclaré : “Il y a trois mois, nous étions à Babylone, en Irak et nous avons rencontré beaucoup de danseurs, notamment un groupe qui a mêlé dabké irakienne et danse hip-hop. En fait, la danse se décompose en plusieurs styles car il y a le break-danse, le new-style, le free-style, le log et la casse.”Habib Tata a également ajouté : “Nous préparons une série de spectacles pour l'après Ramadhan. Le concept est simple : 50 % de danse traditionnelle et 50 % de hip-hop. Nous aspirons également a créer une école avec Hakim Salhi.” L'hôte de la librairie Socrate, qui a entre autres travaillé avec Safy Boutella sur le spectacle Zerbout en 2005, mais aussi tout récemment avec Hakim Salhi sur le clip Mama Africa dédié au Panaf, a imputé le problème de la danse en Algérie au fait que les pouvoirs publics n'ont pas confiance en la jeunesse algérienne. Selon Habib Tata : “Lorsqu'on est Algérien d'Algérie, toutes les portes nous sont fermées alors que si on vient d'ailleurs, de l'étranger donc, toutes les portes s'ouvrent. Pourtant, les Algériens sont les premiers dans le classement des danseurs dans le monde arabe, suivis des Marocains et des Egyptiens. Les Algériens qui sont au nombre de 4050 à travers tout le territoire national, sont très bien perçus à l'étranger et travaillent avec de grandes stars, comme Amr Diab et Nawal Zoghbi. Nous avons également beaucoup de danseurs célèbres à l'étranger mais qui sont inconnus dans le pays.” Habib Tata a également évoqué le 2e Festival culturel panafricain, tout en saluant les organisateurs car “ils n'ont pas marginalisé les algériens.” Il a tout de même exprimé certaines réserves pour le spectacle de l'inauguration du Panaf. “Bien que le chorégraphe soit connu, il n'y avait aucune touche algérienne”, regrette-t-il. D'autre part, Habib Tata a déploré le manque de formation et d'infrastructures ce qui place la danse chorégraphique en Algérie dans une position délicate : la danse est le parent-pauvre de l'art. Il a également évoqué la discorde et la mésentente qui existent entre les chorégraphes en Algérie, ce qui ne favorise pas l'échange. Quant aux associations, Habib Tata n'en est pas vraiment un adepte, car selon lui : “Les associations t'aident pour mieux te manger. J'ai travaillé avec plusieurs associations, mais c'est vraiment de la supercherie. Pour ma part, je veux fonder ma propre association, mais le contexte est difficile car on ne considère pas encore la danse comme un métier, et il faut un piston aussi.” Au cours du débat avec le public, il a été question du marché inexistant de la danse dans le pays, et le rapport malaisé qu'entretiennent les Algériens avec le corps. En plus du rapport à l'image délicat et largement controversé, les Algériens entretiennent un rapport plutôt violent au corps. Et bien que ce soit une pratique sociale très répandue et ancrée dans nos mœurs sociales, la danse a un côté péjoratif, dans un contexte où l'on n'a pas encore admis et reconnu la chorégraphie comme un art à part entière. Par ailleurs, un débat sur la culture a éclaté où tous les concepts ont été confondus. Alors que certains n'arrivaient à percevoir la nuance entre l'art de la danse et la catharsis, d'autres ont volontiers évoqué le cinéma, tout en jetant la pierre –une fois de plus- à la presse qui n'est pas encore spécialisée. Pour en revenir à la danse, les ambitions des jeunes sont grandes, les rêves insaisissables, la réalité amère, mais le combat continue…