Les Allemands votent aujourd'hui dans des législatives qui devraient reconduire Angela Merkel à la tête de la première puissance européenne, mais pas forcément avec les alliés de son choix. Dirigeant le premier parti d'Allemagne, la chancelière la plus populaire de l'après-guerre est assurée, sauf énorme bouleversement de dernière minute, d'obtenir un nouveau mandat de quatre ans. Mais son but est d'obtenir une majorité de gouvernement avec les libéraux du FDP, ce qui est loin d'être acquis, les derniers sondages indiquant, au contraire, qu'elle pourrait être obligée de reconduire sa coalition malaisée avec le Parti social-démocrate (SPD). En 2005 déjà, Mme Merkel avait visé une majorité avec le FDP. Un nouvel échec affaiblirait son emprise sur un parti de tradition catholique où cette protestante venue de l'ex-Allemagne de l'Est a toujours fait figure d'outsider. Merkel voudrait gouverner dans une coalition où les libéraux lui permettront de tailler encore dans le social pour, selon ses propres termes, faire face à la pire crise économique depuis 60 ans en assurant de vraies transformations en Allemagne. Le Parti libéral (FDP) met en avant un programme justement libéral : baisse des impôts pour les plus riches, coupe dans les subventions, réforme du marché du travail, auquel la démocratie chrétienne a renoncé pour ne pas effrayer les couches populaires. Consciente de ses limites, la chancelière a, par ailleurs, mené une campagne bon enfant, évitant les sujets qui fâchent au point où ses détracteurs lui ont reproché d'avoir tout misé sur sa popularité personnelle, refusant de faire des propositions concrètes ou d'attaquer le SPD. De fait, en politique intérieure, Angela Merkel préfère rester au-dessus de la mêlée et se mouille rarement, alors qu'elle n'hésite pas à donner de la voix sur la scène internationale. À la veille des élections, elle s'est rendue au sommet du G-20 à Pittsburgh en se disant prête à repousser toute tentative des Etats-Unis de remettre en cause l'excédent commercial de l'Allemagne, une nouvelle occasion pour elle de soigner son image de “femme la plus puissante du monde”, titre que lui décerne depuis quatre ans le magazine américain Forbes. Sur les cinq partis qui siègent au Bundestag, l'un est exclu d'avance. Aucun ne veut gouverner avec Die Linke, un parti d'extrême gauche qui promet la richesse pour tous et exige un retrait de l'Otan. Le SPD (26 à 27% des intentions de vote) ne parviendra pas à former un gouvernement avec les seules voix des Verts (10 à 11%), avec lesquels il a gouverné jusqu'en 2005. Mais le FDP a refusé par avance, et à l'unanimité, de s'allier avec eux. Les Verts, quant à eux, ont fait savoir qu'ils n'étaient pas prêts à former une coalition avec les conservateurs et le FDP. D'où la forte probabilité de voir l'ancienne coalition reconduite. Sauf miracle, Frank Walter Steinmeier ne sera pas chancelier, le SPD est trop loin dans les intentions de vote, y compris pour former une majorité avec les Verts qui sont ses partenaires de prédilection. Merkel comme Steinmeier ont tous deux répété durant la campagne électorale qu'à la longue, une grande coalition n'est pas bonne pour la démocratie mais, ils se sont ménagés dans les débats électoraux. Ils savent qu'ils seront obligés de continuer à cohabiter. D. Bouatta