L'idée de lancer un débat sur l'identité française, émise par le ministre de l'Immigration, Eric Besson, à quelques encablures des élections régionales, a suscité de nombreuses réactions au sein de l'opposition, mais aussi parmi des leaders de formations de droite composant l'UMP, mouvement au pouvoir. On soupçonne le ministre d'ouverture, ancien cadre du Parti socialiste, de vouloir faire oublier la polémique provoquée par le renvoi à Kaboul de trois ressortissants afghans en situation irrégulière en France. Mais on accuse surtout l'UMP d'une grossière manœuvre électorale qui consiste à inviter le thème cher au Front national dans la campagne électorale en vue de récupérer, comme cela a été souvent le cas, une partie importante de l'électorat du parti de Jean Marie le Pen à l'occasion des prochaines régionales dont les résultats restent indécis. Le Parti socialiste et l'ensemble de la gauche, le Modem de François Bayrou, mais aussi Christine Boutin, présidente du Parti chrétien-démocrate, ancienne ministre du Logement de Sarkozy, sont montés au créneau pour dénoncer l'inopportunité d'un tel débat, les contours que semble vouloir lui donner le ministre de l'Immigration, les dangers que peut comporter un tel débat et les velléités de manipulation à des fins électorales qu'on prête au parti du président. Il faut dire que l'idée de cristalliser l'attention sur un thème aussi récurrent que celui de l'identité nationale, qu'on associe systématiquement, voire pernicieusement, à celui de l'immigration et de l'insécurité, n'est pas sans intérêt pour le parti au pouvoir. Au-delà des bénéfices escomptés en matière d'arithmétique électorale, au détriment du Front national qui perd ainsi son principal fonds de commerce, un tel débat, qui attise forcément les passions, pourrait estomper l'effet dévastateur des nombreuses polémiques nées ces dernières semaines autour de l'Exécutif et de la maison UMP. L'affaire Jean Sarkozy, qui a fait le tour de la planète et qui a créé le buz sur la Toile, s'est terminée en queue de poisson et laissera des traces, malgré la décision finale de l'héritier Sarkozy qui a fini par jeter l'éponge et renoncer à la présidence de l'Epad. Le procès Clairstream, qui est loin de connaître son épilogue, a montré un président français rancunier et hargneux, peu soucieux de la présomption d'innocence et, le soupçonne-t-on, de l'indépendance de la justice qu'il est censé garantir. En tout état de cause, l'affaire pourrait fort bien tourner au profit de Dominique de Villepin qui trouverait alors l'occasion de rebondir politiquement et de créer de réels soucis à Sarkozy dans la perspective du rendez-vous présidentiel de 2012. L'humiliation des députés de l'Assemblée nationale, contraints de voter de nouveau une loi qu'ils ont rejetée il y a à peine une semaine, est, pour sa part, de nature à fissurer la belle unanimité affichée, bon an mal an, par la majorité jusqu'ici. On peut y ajouter la polémique suscitée par le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, après ses déclarations au profit du cinéaste français interpellé en Suisse et autour d'un livre qu'il a publié en 2005, dans lequel il révèle des penchants et des pratiques sexuels peu orthodoxes. Le moins qu'on puisse dire est que cette succession de polémiques, dont certaines déteignent sur la gouvernance de Sarkozy, n'est pas les bienvenues à l'approche d'élections importantes. Le ministre de l'Immigration multiplie les dénégations pour démentir les accusations d'arrière-pensées électorales qu'on prête à son idée de lancer un débat sur l'identité nationale. Il a tenté de le faire lundi soir sur un plateau de France 2, visiblement sans convaincre.