Rares sont les équipes qui sont reparties du Caire indemnes après un match de football, notamment quand il s'agissait de compétition à grand enjeu impliquant la sélection nationale égyptienne, car tous les moyens de pression sont bons pour “terroriser” l'adversaire et le faire céder. Le match Egypte-Algérie de samedi dernier en est l'exemple le plus édifiant. L'impunité dont bénéficie l'Egypte au sein de la Fédération internationale de football (Fifa), où elle est bien représentée avec son membre Abou Rida, lequel est soutenu par le puissant président de la Confédération asiatique de football et néanmoins vice-président de la Fifa, le Qatari Benhamam, fait qu'elle agit comme bon lui semble lors des compétitions organisées sur son territoire. Le Caire est conforté dans ses agissements par l'autre impunité que lui assure également la Confédération africaine de football (CAF), qui est gérée, faut-il le rappeler par des Egyptiens de père en fils. En effet, le principal organe de la CAF, en l'occurrence le secrétariat général, est dirigé depuis plusieurs décennies par les Fahmi. Après le décès de Mourad Fahmi, c'est son fils Mustapha qui lui succède. Incroyable mais vrai, les Egyptiens ont réussi à maintenir entre leurs mains de façon héréditaire une instance sportive continentale. À partir de là, les Egyptiens peuvent tout se permettre pour venir à bout d'une équipe, surtout quand le match retour se déroule chez eux. Les exemples sont nombreux. On citera les cas de l'équipe nationale et des clubs algériens. Outre ce qui s'est passé, samedi dernier, à l'occasion du match retour des éliminatoires jumelées de la Coupe d'Afrique des nations et du Mondial 2010, à l'intérieur et à l'extérieur du Cairo stadium, où les coéquipiers de Karim Ziani en sont arrivés à craindre pour leur vie, il y a eu de nombreux cas similaires où les joueurs algériens ont vécu l'enfer. En 1984, dans le cadre du dernier tour des éliminatoires des Jeux olympiques de Los Angeles, les Fergani, Madjer et autre Cerbah ont fini par céder devant l'insoutenable pression exercée sur eux. Le même scénario s'est renouvelé en novembre 1989 pour le compte du dernier tour du Mondial italien de 1990. Là encore, il y a eu des dépassements inadmissibles avec la complicité de l'arbitre, le Tunisien Bennacer, celui qui avait validé le fameux but de la “main de Dieu” de Diégo Maradona contre l'Angleterre lors de la Coupe du monde de 1986 au Mexique. Malgré la victoire remportée contre le cours du jeu, il y a eu l'incident de l'éborgnement d'un médecin égyptien à l'hôtel où résidait la délégation algérienne. Le joueur algérien le plus en vue de l'époque, Lakhdar Belloumi, a été désigné par les Egyptiens comme l'agresseur, sans preuves. Belloumi est resté vingt ans sans quitter le territoire national, car le Caire a fait émettre contre lui un mandat d'arrêt international par Interpol. Ce n'est que cette année que le mandat a été retiré après un arrangement à l'amiable. Ces pratiques égyptiennes sont également valables pour les clubs lors des compétitions continentales de la CAF. L'un des rares clubs algériens à être reparti du Caire avec la qualification en poche est le Mouloudia d'Alger en 1976, année où il avait remporté la Coupe d'Afrique des clubs champions. Malgré sa large victoire (3 à 0) au stade du 5-Juillet, on avait craint pour les chances des camarades d'Ali Bencheikh en raison, d'un côté, du talent des Mahmoud al-Khatib, Ikramy et autres Mustapha Abdou, mais surtout des conditions de séjour et de déroulement du match. Il n'en demeure pas moins que grâce aux prouesses du gardien de but mouloudéen, Kaoua Abdenour, qui ne s'est incliné qu'une seule fois sur pénalty, le MC Alger a éliminé le Ahly du Caire. Quant aux autres équipes algériennes, elles ont en majorité laissé des plumes en Egypte. Idem pour la majeure partie des équipes ayant affronté les Pharaons ou un autre club égyptien devant leur public. Il faut croire que c'est une véritable stratégie qui existe dans ce pays pour sortir toujours vainqueur, surtout qu'il n'échappe à personne que le football est une seconde religion en Egypte, que le pouvoir exploite de manière étudiée pour perpétuer son règne et faire taire la grogne sociale. Une fois l'objectif atteint, à savoir la victoire ou la qualification, viennent les tentatives d'amadouer l'adversaire. Cette fois-ci, cela n'a pas marché avec les Algériens, comme le montre ce regain de patriotisme après les incidents du Caire.