Le secrétaire général de la Ligue arabe, et néanmoins Egyptien Amr Moussa, aurait demandé à Mouammar Kadhafi d'arranger entre Bouteflika et Moubarak. Si le mécanisme fonctionne, cela prouvera que nous ne sommes pas sortis des “araberies”. La gravité des actes qui ont engagé une Egypte solidaire avec sa population, sa police, ses sportifs, ses artistes, ses intellectuels, ses diplomates, son gouvernement et son Président, contre l'Algérie et les Algériens fait que l'issue ne pourrait raisonnablement se réduire à une séance de réconciliation des deux Présidents fumant le calumet de la paix. Les Egyptiens, agresseurs délibérés de l'équipe de football d'Algérie, puis de ses supporters et enfin de l'honneur du pays, même s'ils n'ont pas essuyé la réponse politique attendue du gouvernement algérien, sont en droit d'enregistrer le niveau de réaction populaire en Algérie. Sans égaler, en termes d'agressivité, la provocation, celle-ci a montré la détermination et le talent mis à relever le défi qui nous a été imposé. Mais le spectre d'une réconciliation post-massacre sous le chapiteau de Kadhafi nous renvoie directement à la dérive bédouine d'une république de “grandes tentes” qui nous a fourvoyés dans un univers culturel qui, décidément, refuse d'accéder à la normalisation moderniste des relations internationales. Nous en serions encore à la mystification arabisée qui a légitimé la livraison culturelle de l'Algérie à l'Egypte par Ben Bella et qui fait qu'aujourd'hui, Adel Imam nous insulte après avoir été couvert de chèques Khalifa par un pouvoir qui a pris l'étrange habitude d'acheter les fréquentations qu'il croit valorisantes. Ce n'est peut-être pas pure coïncidence que, aujourd'hui, le premier président de l'Algérie ait trouvé emploi à la présidence du Comité international du prix Kadhafi… des droits de l'Homme. Plaisanterie mise à part, on voit là que la disponibilité de nos “historiques” nous est bien plus préjudiciable que la haine de nos envieux. Kadhafi, dont l'opportunisme diplomatique et médiatique n'est plus à prouver, veut s'offrir, au rabais, un acte d'utilité morale en jouant les go between entre Bouteflika et Moubarak. Inaccessible à des problématiques qui engagent des nations, il ne retient des Etats que les noms de leurs chefs et des Etats “arabes” que les noms de leurs dictateurs. De par la nature de son régime, Kadhafi ne conçoit pas que certaines péripéties puissent engager un peuple et que son souverain “guide” n'a alors que le choix d'accompagner le mouvement de ce peuple. Ce qui l'amène à réduire la crise algéro-égyptienne à un malentendu entre deux “guides”. Il suffit alors de l'intervention d'un troisième, “roi des rois africains” qui plus est, pour réduire, à trois, la brouille en se vautrant sous un confortable chapiteau autour d'un thé brûlant. Si, par ailleurs, le président en exercice de l'UA avait vocation de Monsieur bons offices, on l'aurait vite su, avec tous les feux qu'il y a à éteindre en Afrique. Il y a eu trop d'honneur et d'engagement des Algériens impliqués dans cette péripétie ; son issue mérite plus qu'un toast expédié. On ne peut pas sacrifier un historique élan de solidarité et de patriotisme sur l'autel de mielleuses étreintes orientales avant d'en tirer ses leçons politiques. M. H. [email protected]