Le monde a célébré hier la 10e Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. En proclamant cette journée, en 1999, l'Assemblée générale des Nations unies avait affirmé que “la violence à l'égard des femmes va à l'encontre de l'instauration de l'égalité, du développement et de la paix”. Elle avait également interpellé tous les Etats, en insistant sur l'urgence de l'application “des droits et principes” consacrant l'égalité, la sécurité, la liberté, l'intégrité et la dignité des hommes et des femmes, qui sont consacrés notamment dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (Cedaw). Des progrès ont certes été enregistrés dans ce domaine, mais beaucoup reste encore à faire : dans tous les pays, des femmes et des filles continuent de subir des souffrances terribles du fait de la violence. Les résultats d'une enquête récente, fondée sur 50 enquêtes menées de par le monde, montrent que plus de 60% des femmes ont subi des violences de la part d'un homme à un moment de leur vie. Une femme sur 3 au moins a reçu des coups ou subi d'autres formes de mauvais traitements au cours de son existence. Des millions de femmes sont violées par leur compagnon, un proche, un ami ou un inconnu, par leur employeur ou un collègue, ou encore par des soldats ou des membres de groupes armés. En Algérie, les services de la Gendarmerie nationale ont dénombré quelque 2 803 femmes victimes de violences, pour seulement la période allant de janvier à octobre 2009. Les coups et blessures volontaires, les vols, les homicides involontaires et les viols ont concerné 1 501 cas, soit plus de 53%. La même source informe que 186 femmes sont victimes d'attentat à la pudeur, 168 cas victimes de viol à domicile, 108 cas d'enlèvement et 123 cas de menaces. Elle révèle, en outre, que 14 femmes sont victimes d'inceste. Aujourd'hui, comme on le voit, les violences faites aux femmes prennent l'ampleur d'une pandémie. Elles portent gravement atteinte aussi bien à la santé publique qu'aux droits de l'Homme. Les enquêtes et études menées, depuis 2002, dans notre pays, ont dévoilé la proportion prise par les violences physiques, sans pour autant réduire la portée des autres souffrances éprouvées par les victimes qui, pour des raisons liées surtout à l'environnement et au niveau culturel sont cachées dans la plupart des cas : violence psychologique, harcèlement sexuel, viol, inceste, etc. Il y a quelques jours, Faïka Medjahed, responsable du service Femmes à l'Institut national de santé publique (INSP) et spécialiste dans la santé mentale, a mis en exergue le parcours franchi, ces dernières années, pour lutter contre ce phénomène et surtout apprendre à nommer l'innommable. Dans ce cadre, elle a annoncé l'élaboration, par le jeune ministère chargé de la Femme, d'une “planification stratégique de lutte contre les violences fondées sur le genre”, de la mise en place d'une collecte de données statistiques sur ce thème et de la préparation d'un “plan stratégique de communication”. Sans oublier de parler du travail formidable fait par les rares centres d'écoute et d'accueil des femmes victimes de violences. Malgré ces actions louables, “la question des violences à l'égard des femmes ne bénéficie toujours pas d'appui financier indispensable pour l'élimination des violences ciblant les femmes”, a observé Mme Medjahed. Cette dernière a enfin signalé l'insuffisance des “études et recherches sur ce sujet épineux”, pourtant si indispensables pour déconstruire notamment “les dispositifs culturels et religieux, qui ont consacré la marginalisation des femmes musulmanes”.