Près de vingt ans après l'avènement du terrorisme, il est difficile d'imaginer qu'un important tronçon d'une route nationale soit toujours fermé à la circulation pour des motifs sécuritaires. C'est le cas notamment de la RN24 qui relie la ville de Tigzirt à celle de Dellys sur une distance de 26 km. Si, ailleurs, les populations renouent avec la normalisation de la vie de tous les jours suite à la nette amélioration de la situation sécuritaire, celle de la Kabylie maritime en souffre toujours. “Cela ressemble à une malédiction. Le terrorisme est né ailleurs et nous, nous subissons injustement les conséquences depuis 20 ans maintenant, sans omettre de dire que là où le terrorisme est né la situation se normalise”, nous a déclaré Ali, un citoyen de Tigzirt. Et à Saïd, un commerçant, d'enchaîner : “Dites-leur que notre région est mise en quarantaine et que nous étouffons suite à la coupure inexpliquée et prolongée des routes sous le prétexte sécuritaire.” À rappeler que ce tronçon de route nationale est coupé à la circulation au village Mazer, dans la commune de Mizrana, à 7 km au nord-ouest de la ville de Tigzirt. Dans la foulée de l'amélioration de la situation sécuritaire, plusieurs fois louée par les pouvoirs publics, les citoyens de la région, ainsi que les commerçants ont lancé plusieurs pétitions suivies de requêtes, en vain, pour demander la réouverture de cette route à la circulation. Parmi les plus importantes manifestations lancées à cet effet, on compte les multiples journées de grève des commerçants entraînant la paralysie totale de la ville de Tigzirt et des communes limitrophes. Des élus, à l'exemple de certains députés, ont même interpellé en plénière de l'APN le ministre de l'Intérieur sur cette fermeture. Dans sa réponse aux députés, le ministre a déclaré que “cette route est fermée à la circulation pour des raisons sécuritaires. À cet effet, nous allons procéder à sa sécurisation et sa réouverture.” Ces déclarations remontent à près d'une année et, à ce jour, aucune volonté n'est affichée pour la normalisation. À signaler que le tort de ce tronçon de la RN24 est qu'il traverse la forêt de Mizrana, une jungle de près de 3 000 ha, investie par les différents groupes terroristes islamistes depuis l'avènement du terrorisme. Pour se rendre à Dellys, il faudra emprunter un long détour par Mizrana et Afir. En plus de la pénalisation de la bonne circulation de personnes, cette fermeture provoque un déficit important sur le plan économique pour les villes de Dellys et de Tigzirt. “Depuis la nuit des temps, Dellys est le grenier de Tigzirt. Depuis cette fermeture, nous sommes tristes et Tigzirt paraît comme une lointaine ville esseulée et isolée pour des raisons non convaincantes”, nous a déclaré Tarik, un autre citoyen de Tigzirt. En plus de la ville de Dellys, cette route constituait un véritable raccourci pour se rendre à Alger, en évitant la tortueuse RN71. “Que nos responsables sachent qu'en annonçant la normalisation de la situation sécuritaire, des routes nationales sont toujours fermées et, par conséquent, des centaines de milliers de citoyens restent pénalisés. Et qu'ils nous disent jusqu'où ira cette fermeture”, nous a déclaré Brahim, un commerçant de Tigzirt.