Enfant, collégien que j'étais, ses connaissances, ses lectures, son expérience, son attachement viscéral à la mère patrie l'Algérie et son intelligence inégalée, me fascinaient. M'envoûtaient. Lui, qui, en pleine guerre de Libération, disait : “Prions, pour que la France mette un terme aux souffrances des Algériens ! Prions, mes frères, pour le retour de la paix en terre algérienne, prions pour le triomphe de la liberté, prions pour la victoire des combattants algériens !” Et c'est grâce à lui que j'ai appris que la révolution algérienne était “l'œuvre” des hommes libres sans discrimination religieuse ou linguistique. Alfred Berenguer nous parlait, avec courage et franchise, de Ferhat Abbas, de Youssef Benkhadda, de Ben Bella, de Ché Guevara, de Abbane Ramdane... Après l'Indépendance, il est de retour au pays libéré. Il décida de vivre à Remchi (petit village de la wilaya de Tlemcen). Et, à l'unanimité, il a été élu à la première Assemblée constituante de l'Algérie indépendante. En ces jours de questions autour de nos références, nous avons besoin, plutôt, il est nécessaire et urgent de relire notre histoire ancienne et moderne. Nous avons besoin de faire renaître et connaître ces oubliés à la nouvelle génération qui se cherche dans des amalgames politico-religieux. Il était modeste, cet Alfred Berenguer, hiver comme été, il portait une seule veste, dont les manches sont souvent utilisées pour “brosser” la craie blanche sur le noir du tableau. Il était unique dans sa raison et dans sa folie raisonnée. Au service de l'Algérie, il était toujours debout entre le poète, le révolutionnaire et l'humaniste visionnaire. Une grande tolérance. En ces moments de crise d'identité, d'amalgame et de questionnement, je vous invite à lire ou à relire le livre d'Alfred Berenguer Un curé d'Algérie en Amérique latine 1959-1960 (paru en 1966), sur sa mission en Amérique latine, en tant que délégué permanent du FLN puis du GPRA, dans cette partie du monde. Et, en cette période, où le débat autour des références civilisationnelles et linguistiques de notre identité est lancé, nous avons besoin, avec une résolution intellectuelle, de revisiter l'histoire de ces intellectuels et militants humanistes oubliés, à l'image d'Alfred Berenguer, André Mandouze, André Gallice, Pierre Chaulet, Jacques Chevalier, Mgr Duval et d'autres afin de présenter à nos jeunes une autre image aussi complète, aussi vraie sur notre “moi” national. Et enfin, faire renaître notre grande “Algérie”, longtemps rêvée. A. Z. [email protected]