Officiellement, entre le président Obama et sa secrétaire d'Etat Hillary Clinton, tout baigne. Pas l'ombre d'une ride dans leurs relations. Pourtant, il y a des signes, à peine perceptibles certes, qui tendent à montrer que la longue et dure compétition des primaires, ponctuée d'échanges peu amènes entre deux personnalités au caractère bien trempé, a fatalement laissé des traces. En charge de la diplomatie, l'ancienne première dame des Etats-Unis a avalé une première couleuvre quelques jours à peine après l'installation de l'Administration. La nomination de deux émissaires spéciaux, l'un pour le Proche-Orient et l'autre pour l'Afghanistan et le Pakistan, qui rendent comptent directement au locataire de la Maison-Blanche, ressemble à un camouflet pour la secrétaire d'Etat, même si elle n'en a rien laissé paraître. Le département d'Etat a été en quelque sorte délesté des deux dossiers les plus délicats de la politique étrangère américaine. Pourtant, ce n'est que beaucoup plus tard, à l'occasion d'un long périple en Afrique, qu'Hillary Clinton a craqué. Elle a surpris tous les observateurs par sa nervosité et sa violence à l'occasion d'une conférence de presse, alors qu'un journaliste lui demandait de commenter la mission de son époux, Bill Clinton, en Corée du Nord, où il a négocié et obtenu la libération de deux ressortissantes américaines tenues prisonnières à Pyong Yang. Tout laissait croire qu'elle désapprouvait cette mission de bons offices, à plus forte raison qu'elle n'a pas été consultée, selon toute vraisemblance. Depuis, par petites touches et à diverses occasions, elle n'a cessé de marquer sa différence par rapport au discours et à la vision du Président. Cela a commencé avec le dossier israélo-palestinien. Au plus fort de la tension entre Washington et Tel-Aviv, alors que le président Obama et George Mitchell mettaient la pression sur Benjamin Netanyahu pour accepter l'idée d'un Etat palestinien souverain et mettre fin à la colonisation en Cisjordanie, la secrétaire d'Etat, sans les relayer, a jugé plus opportun de demander aux pays arabes de faire des gestes en direction d'Israël. Il y a eu ensuite sa visite à Islamabad où elle a formulé des accusations gravissimes à l'encontre du gouvernement local dans des termes qui n'ont rien de diplomatique, au risque de réduire à néant les efforts d'Obama, qui venait de recevoir le président pakistanais pour reconsidérer et renforcer leur collaboration dans la lutte contre le terrorisme islamiste. En visite au Maroc, elle a donné son quitus au royaume pour sa politique au Sahara occidental, alors que la Maison-Blanche est beaucoup plus nuancée sur le sujet. Au plus fort de la contestation des résultats de la présidentielle en Iran, alors que les contestataires sont accusés par le régime d'être manipulés par l'Occident et au moment où Barack Obama observait la plus grande prudence afin de ne pas discréditer sa politique de la main tendue, elle n'a pas hésité à déclarer publiquement que les Etats-Unis soutiendraient l'opposition par tous les moyens… Maladresses de néophyte ? Très peu probable. Une chose est pourtant sûre : au moins, sur le dossier israélo-palestinien, elle semble avoir remporté la partie. Barack Obama n'est-il pas revenu à une position plus conforme à la tradition américaine sur le sujet ?