La paix au Libéria l'exige, le président Charles Taylor doit quitter le pouvoir et le pays, comme l'ont décidé ses voisins ouest-africains et les rebelles qui l'assiègent, mais l'ancien chef de guerre entretient le doute. Sous la pression conjuguée des dirigeants de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'ouest (CEDEAO), des Etats-Unis, des Nations unies et des rebelles qui contrôlent plus des trois-quarts de son territoire, Charles Taylor a annoncé qu'il remettrait le pouvoir le lundi 11 août. L'ancien chef rebelle, inculpé pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité par un tribunal spécial de Freetown pour son implication dans la guerre civile en Sierra Leone voisine, s'est aussi à plusieurs reprises engagé à quitter le Libéria pour le Nigeria. Le président Olusegun Obasanjo lui a promis un "asile sûr", invoquant un "geste humanitaire". Mais le président libérien, qui insiste pour partir "en homme libre", s'est bien gardé de donner une date précise pour son éventuel exil, et a, une nouvelle fois ,semé la confusion mardi en posant de "nouvelles conditions", selon un porte-parole de la présidence d'Abuja. Selon un sommet extraordinaire de la CEDEAO tenu à Accra la semaine dernière, Charles Taylor aurait pourtant dû partir dès le jeudi 7 août, soit trois jours après l'arrivée au Libéria des premiers éléments nigérians d'une force de paix ouest-africaine. Charles Taylor n'en est pas à un revirement près et pourrait finalement décider de conserver le pouvoir ou de passer la main et rester au Libéria. Il serait alors pris entre les rebelles, qui contrôlent plus des trois-quarts du pays, dont une partie de la capitale, et la force d'interposition multinationale. Nombreux sont les Libériens et les diplomates qui envisagent cette possibilité. Le maître assiégé de Monrovia n'aurait alors d'autre alternative que de revêtir de nouveau le treillis pour reprendre le maquis et la kalachnikov avec une poignée de fidèles. S'il cède et part pour le Nigeria, Charles Taylor, ne sera pas pour autant au bout de ses ennuis. Mais il aura gagné du temps. "La question de l'impunité se pose, mais il y aussi la question de la paix, et on ne peut pas sacrifier la paix à l'impunité. Quand il y aura la paix au Libéria, on verra pour l'inculpation de Taylor", estime ce diplomate. En théorie, tout dépend du procureur du tribunal spécial pour les crimes de guerre en Sierra Leone, l'Américain David Crane. Le gouvernement libérien, qui conteste la compétence du tribunal de Freetown, a introduit lundi un recours en annulation de cette inculpation auprès de la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye.