Contrairement aux récents propos apaisants de l'ambassadeur d'Algérie en France, Missoum Sbih, qui a refusé de parler de crise entre Alger et Paris, le conseiller aux droits de l'homme du président Bouteflika, Kamel Rezzag-Bara, a affirmé que l'annulation de la visite du chef de l'Etat algérien dans l'Hexagone est due au différend sur la colonisation tout en appelant à la criminalisation de celle-ci par l'ONU. Entre l'Algérie et la France, la crise est bien là ! Les déclarations du conseiller du président Abdelaziz Bouteflika aux droits de l'homme, Kamel Rezzag-Bara, rapportées hier par le quotidien arabophone londonien Asharqalawsat, ne laissent planer aucun doute là-dessus. En effet, le responsable algérien n'a pas hésité à affirmer que l'annulation de la visite que devait faire Bouteflika à Paris est essentiellement due au différend existant entre les deux pays sur la colonisation. Sur cette question, Rezzag-Bara lancera un appel en direction de la communauté internationale pour un “consensus mondial” sur la criminalisation de la colonisation par l'Organisation des Nations unies. Ainsi, l'Algérie donne une autre dimension au bras de fer qui l'oppose à la France depuis que cette dernière a fait adopter par son Assemblée nationale et son Sénat, le 23 février 2005, une loi glorifiant la colonisation. Le conseiller du président Bouteflika affirmera que le droit international “est appelé à faire des progrès pour considérer la colonisation, une opération de destruction et de démolition, qui a été pratiquée contre des peuples entiers, afin qu'elle soit classée comme un crime contre l'humanité qui ne se distingue pas des autres crimes, tels l'esclavagisme et l'apartheid, voire même le génocide”. Dans ce cadre, il ajoutera que les progrès auxquels il appelle ne peuvent se concrétiser que si “les pays fournissent des efforts pour aboutir à un consensus mondial, lequel constituera une base pour les Nations unies considérant la colonisation comme un crime contre l'humanité”. En réponse à une question sur l'éventualité de poursuivre la France devant les juridictions internationales en l'accusant de crimes contre l'humanité, cinquante ans après l'indépendance de l'Algérie, Rezzag-Barra dira : “Le droit international ne reconnaît pas ce genre de crimes”. Par ailleurs, Saïd Abadou, premier responsable de l'Organisation nationale des moudjahidine, affirmera qu'il soutient le projet des parlementaires algériens relatif à l'adoption d'une loi criminalisant la colonisation, qui ouvrirait la porte à des poursuites à l'encontre de responsables français de l'époque encore en vie pour les crimes commis durant la colonisation de l'Algérie ainsi que la demande d'indemnisations. “Les membres de la famille révolutionnaire soutiennent cette loi et la défendent avec force, afin qu'elle soit appliquée”, déclarera Saïd Abadou, le chef de file de la puissante ONM. Pour rappel, 125 parlementaires algériens, appartenant en majorité à l'Alliance présidentielle, composée du FLN, du RND et du MSP, s'activent à faire adopter un projet de loi criminalisant la colonisation française en Algérie. En outre, une autre source gouvernementale algérienne confirmera que la cause du report à une date indéterminée puis de l'annulation pure et simple de la visite du chef de l'Etat algérien, prévue pour l'été dernier en France, est due essentiellement à l'absence de résultats dans les dossiers importants entre les deux pays. Il ajoutera que la réaction négative des responsables français par rapport au projet de loi algérien criminalisant la colonisation “nous a poussés à radicaliser notre position quant à la visite du président algérien, parce que nous ne pensons pas qu'une normalisation des relations bilatérales puisse se faire avant longtemps”. Voilà des propos qui confirment que le dégel entre Paris et Alger n'est pas près de se produire, bien au contraire.