Le “rois des africains” rattrapé par ses saillies politiques. Le Nigeria a rappelé son ambassadeur à Tripoli après les propos “irresponsables” du dirigeant libyen. Kadhafi a suggéré une partition du Nigeria entre deux Etats, un chrétien et un musulman, pour mettre fin aux violences communautaires. Le politiquement correct n'a jamais été la tasse de Kadhafi. Le père de la révolution verte, qui s'est affublé du titre de “roi des rois africains”, a réuni des étudiants africains inscrits dans son pays pour leur faire part de sa solution pour le géant africain, le Nigeria aux prises avec une grave et insurmontable crise intercommunautaire. Il a proposé aux dirigeants d'Abuja la partition de leur pays en deux Etats, l'un chrétien et l'autre musulman. Rien que cela. Pour argumenter son ordonnance, le leader libyen a ergoté sur le modèle de la partition qui a donné naissance en 1947 au Pakistan, qui s'est détaché de l'Inde, faisant fi des problèmes, dissensions, tensions et conflits qui n'ont pas arrêté d'empoisonner ces deux puissances atomiques, travaillées au corps par l'extrémisme. Islamabad par les islamistes radicaux et New Delhi par des ultras hindous, violemment islamophobes. Kadhafi, qui aime pérorer, a fait un parallèle pour souhaiter la venue d'un Mohamed Ali Jennah qui avait fondé le Pakistan pour mettre fin aux massacres entre hindous et musulmans dans le sous-continent indien. “La seule chose qui pourrait faire cesser les violences au Nigeria est l'apparition d'un autre Mohamed Ali Jinnah, qui établisse un Etat pour les musulmans et un autre pour les chrétiens”, a-t-il martelé. Le dirigeant libyen, président de l'Union africaine il y a encore quelques semaines, a appelé l'ex-président du Nigeria Olusegun Obasanjo, qu'il considère, apparemment, comme l'homme fort du Nigeria, à jouer le rôle de Mohamed Ali Jinnah côté chrétien. Pour lui, redessiner la carte d'un pays est simple. Désarmant pour un chef d'Etat qui a failli mettre le feu aux poudres pour des arpents de terre avec ses voisins, dont le Niger récemment à qui il dispute le nord, gorgé de pétrole. Le Nigeria est invité à fixer “dans un climat cordial” les frontières de chaque Etat en veillant à partager les ressources “de manière pacifique et par la négociation fraternelle” ! Naïveté ou cynisme ? Il n'en fallait pas plus pour le numéro deux du Nigeria, le président du Sénat David Mark, qualifie Kadhafi de “fou” devant la Haute Assemblée du pays. Le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique avec environ 150 millions d'habitants, a revécu la semaine dernière des violences communautaires meurtrières dans l'Etat du Plateau (centre). Et c'est vrai que le pays est comme divisé au centre entre le Nord musulman et le Sud chrétien et animiste. L'Etat du Plateau avec sa capitale Jos où se déroulent les violences, constitue la ligne de démarcation entre le nord et le sud. La reprise de heurts a été provoquée par la construction d'une mosquée dans le quartier majoritairement chrétien de Nassarawa Gwom. Quelque 3 000 habitants ont été déplacés en raison des violences durant lesquelles des maisons ont été brûlées. En novembre 2008, des centaines de personnes avaient été tuées en deux jours à Jos au cours d'affrontements religieux. Le Nigeria est une fédération et la charia est appliquée dans plusieurs Etats musulmans du Nord, plus pauvres que ceux du Sud assis sur le pétrole.